LE RÉGIME BIYA CRÉE ET FINANCE UN GROUPE DE TERRORISTES ANGLOPHONES
Par Michel Biem Tong, Web-journaliste, exilé
Ne nous laissons pas manipuler. Ne nous laissons pas mener en bateau par le pouvoir voyou de Yaoundé et ses agents. N’oublions pas que lorsque les 22 septembre et 1er octobre 2017, les Anglophones des 13 départements des régions du nord-ouest et du sud-ouest se sont levés comme un seul homme et en masse pour manifester dans les rues, ils ont voulu envoyer un message fort à Yaoundé : le désir d’indépendance octroyée par une résolution des Nations Unies depuis avril 1961 mais
jamais respectée par la République du Cameroun est très ardent et une aspiration irrépressible du peuple anglophone.
Les soldats déployés sur le terrain par le régime Biya ont réprimé ces manifestations qui se sont soldées par le massacre de centaines de
personnes tuées à balles réelles. Révoltées, les populations vivant en zone anglophone se sont constituées en groupes d’autodéfense qui dans les semaines qui ont suivis, ont brillé par des actions sporadiques avec pour cibles des militaires, gendarmes et policiers. Ce qui a poussé le président Paul Biya le 30 novembre 2017 a déclaré la guerre à ce qu’il a lui-même appelé les « terroristes sécessionnistes ».
Quelques mois après le déclenchement de la guerre, des difficultés commencent à poindre. La symbiose entre les populations anglophones et les forces indépendantistes anglophones rend ardue la tâche à l’armée qui s’est donné un mois pour « désambazoniser » la zone anglophone.
C’est ainsi que naît la stratégie qui consiste à créer des bandes armées parallèles, une technique contre -révolutionnaire avec pour objectif de déconstruire l’image des véritables combattants indépendantistes vis-à-vis des populations locales et de l’opinion internationale. Il s’agit d’une technique expérimentée par les armées camerounaise et française face à la branche armée de l’Union des populations du Cameroun lors de la guerre d’indépendance du Cameroun
au début des années 1960.
La technique fut mise en place en avril 2018. Dans plusieurs arrondissements du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, des groupes armés
sponsorisés par l’élite gouvernementale locale ont commencé à apparaître. Mais un premier incident va naître. Après avoir terrorisé
les populations dans tout l’arrondissement, kidnappé contre rançons, torturé, saccagé les chefferies, une trentaine de jeunes va être
exécuté sommairement par des hommes armés en civil un matin du 25 mai 2018 à Menka Pinying (nord-ouest).
D’après une source proche des services secrets camerounais qui nous a contacté à cette époque, il s’agit d’un groupe de jeunes «SantaQuifors » formé et payé par l’actuel ministre de l’Administration territoriale, Paul Atanga Nji pour kidnapper et exiger des rançons en se faisant passer pour les « restorations forces », les forces
indépendantistes anglophones. C’est parce que ces derniers n’ont pas rempli la mission que leurs commanditaires ont été obligés de les tuer de peur que devant les tribunaux, ils ne révèlent des collusions entre des hommes du pouvoir et eux. C’est ainsi qu’à défaut de réduire à néant les forces indépendantistes très liées à la population, le pouvoir a opté pour une contre-publicité de ces groupes.
C’est ainsi que plusieurs groupes armés acquis au régime Biya se sont démultipliés dans l’ex-British Southern Cameroons. D’après une source qui se veut confidentielle proche des services de sécurité, il existe deux groupes « séparatistes » en zone anglophone : les « Atanga Nji Boys » proches du ministre de l’Administration territoriale et un autre groupe de policiers, gendarmes et militaires déguisés en Amba Boys.
Lors de mon audition à la Division de la Sécurité Militaire le 23 octobre 2018, un agent de ce service de renseignement militaire m’a
confié que le pouvoir de Yaoundé, à travers ce service, a mis en place une stratégie qui consiste à infiltrer les restorations forces pour les diviser. Une fois dans ma cellule 22 au secrétariat d’Etat à la défense (SED), un de mes co-gardés-à-vue, anglophone, m’a fait cette confidence : « il y a des Amba Boys chez nous que les élites financent, eux ils sont très violents envers la population, par contre les vrais Amba Boys vivent avec cette population qui les soutient. Parfois, ils offrent à manger et à boire aux populations ».
Ce sont ces « séparatistes » du pouvoir qui kidnappent contre rançons, brûlent des habitations, torturent les civils, les égorgent ou les tuent, s’attaquent au bétail et tuent au sein de la communauté Bororo du nord-ouest. Ce sont ces « séparatistes » d’un autre genre qui ont creusé la route à l’entrée de Bamenda dans la nuit du 8 au 9 septembre 2018 à l’aide d’un caterpillar, qui ont kidnappé le 4 septembre 2018 des élèves du PGHS de Bafut et tué son principal, qui ont enlevé 75 élèves à Bamenda en novembre 2018, qui ont décapité un enseignant tout récemment, etc.
La stratégie ici consiste à retourner les populations contre les restorations forces auxquelles elles sont acquisent, attirer l’attention de la communauté internationale et surtout et surtout les ONG internationales telles qu’Amnesty International, Human Right Watch sur les conséquences des révolutionnaires anglophones sur leur propre population. Bien entendu, il n’est pas question d’absoudre tous les exécutions sommaires des militaires capturés par les forces indépendantistes anglophones mais d’attirer l’attention de l’opinion nationale et internationale que le pouvoir de Yaoundé tend à vouloir rouler dans la farine.
Cette technique d’infiltration des mouvements indépendantistes anglophones n’est pas nouveau. L’on se souvient qu’en 1997, pour contenir la montée en puissance du Southern Cameroons National Council (SCNC), les services secrets camerounais ont mis en place un plan qui consistait à attaquer les sites civils et militaires dans la zone anglophone, faire annoncer à la radio et télévision nationale CRTV que ce sont les sécessionnistes qui les ont attaqué avant de procéder à des arrestations en masses et même à des assassinats des militants du SCNC. C’est le 29 mars 1997 que ce plan diabolique a été exécuté. Ce jour-là, des centaines de militants du SCNC dont dont Ebenezer Akwanga de la Youth League of Southern Cameroons, ont été arrêtés à Bamenda et aux environs puis déportés à Yaoundé pour être jetés à la prison
centrale de Kondengui.