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L’INSTRUMENTALISATION DU PATRIOTISME POUR DÉDOUANER LE RÉGIME CRIMINEL DE BIYA

Le citoyen est pris entre le marteau des indigénistes nativistes et corrompus habituels du parti État  RDPC, et l’enclume des opposants progressistes traditionnels de tout bord favorables au changement vrai au Cameroun.
Comme à l’accoutumée, Amnesty International rend public son rapport sur les graves exactions et les violations des droits humains dans le Nord Ouest et le Sud Ouest, le ministre de la Communication et porte- parole du gouvernement Issa Chiroma  fait une sortie maladroite et bancale sur les Camerounais de l’étranger prétendument manipulés par les “puissances étrangères tapies dans l’ombre”. Les réseaux sociaux bruissent aussi de cette musique terrifiante de cette funeste théorie du complot du genre: «Faites très attention aux Camerounais de l’étranger qu’on veut utiliser comme des marionnettes pour déstabiliser notre pays et voler ses richesses». Comprendre, en langage décodé: «Les Camerounais de la Diaspora sont des ennemis du Cameroun et nous les griots de Biya sommes les patriotes qui luttons contre les puissances étrangères qui cherchent à piller notre pays».

C’est ce genre de manipulations que je tiens à dénoncer de manière très musclée en m’appuyant sur des arguments poignants afin d’exposer les limites et même l’ironie dans les propos mensongers que l’on fait lire Chiroma comme un perroquet. Ainsi, le porte parole du gouvernement Biya réalise que le Cameroun est riche en matières premières. Ce qu’il a omis de dire au peuple Camerounais c’est la manière dont Biya utilise cette richesse depuis 1961 en tant que l’un des plus vieux fonctionnaire du Cameroun neocolonial au service de la France. La première marionnette manipulée par des puissances étrangères se trouve être PAUL BIYA, qui aime se décrire comme le meilleur élève de la France. Il suffit de questionner des rapports incestueux avec le groupe Bollore et d’autres entreprises françaises qui pillent les forêts camerounaises et le pétrole qui ne profitent même pas aux populations du Cameroun.

ETRE CAMEROUNAIS ET FIER ÇA NE VEUT DONC ABSOLUMENT RIEN DIRE…

Après la déclaration de guerre par Biya contre les séparatistes anglophones, les griots du RDPC sont montés au créneau pour lancer la chasse aux sorcières dans un “maccarthysme” qui dictait à chaque Camerounais l’amour de l’armée et de son président dans une guerre civile perdue d’avance pour imposer un “Cameroun un et indivisible” à tout le monde. Quiconque osait remettre en question cette pensée unique démodée et dépassée était rapidement taxé d’apologiste en faveur des terroristes, et toute sympathie en faveur du fédéralisme était criminalisée comme une menace à l’unité de l’État Camerounais.

Au fond, que souhaitent tous les griots de Paul Biya à l’instar de Chiroma et sans brigade anti occidentale? Faire peur d’une menace de déstabilisation du pays par ces mêmes occidentaux qui sont les patrons de la Banque Mondiale et du Fond Monitaire International qui supervisent le nouveau plan d’ajustement structurel sous lequel est soumis le Cameroun. Si on comprend le raisonnement maladroit et absurde de Chiroma, le régime Biya veut aller en guerre contre la France, les Américains, l’Union Européenne et même les Nations Unies dans sa guerre contre les séparatistes anglophones que Chiroma considère être en connivence avec les pays étrangers pour piller les “matières premières du Cameroun”. Existe-t-il désormais une machine aux algorithmes assez puissants pour texter le degré de “marionette” de nos dirigeants? Si oui, celui qui est à la tête du pays, lorsqu’il a confié  le pétrole offshore du Cameroun à Limbe à la France pour confisquer le pouvoir à vie, cela ne compte plus comme piller le Cameroun de ses matières premières? Et que dire de ses nombreux séjours privés en Suisse qui coûtent des millions d’euros aux caisses de l’État? C’est donc ce patriotisme exacerbé qui force Biya à envoyer tous ses enfants n’étudier que chez ces occidentaux? Et que dire des évacuations sanitaires des membres du gouvernement vers cette France devenue pour la circonstance une puissance qui veut recruter des nouvelles marionnettes pour installer à la tête du Cameroun et voler ses richesses? Bon courage au porte parole du régime corrompu de Biya pour satisfaire tous ces esprits faibles manipulés et infantilisés qui gonflent les rangs du RDPC; autant essayer de convaincre une meute de loups de devenir végétariens.

Avant la guerre totale contre Boko Haram en 2013 et la guerre totale contre les séparatistes anglophones en 2017, le football était encore l’unique lieu privilégié d’expression de la fierté nationale pour les Camerounais. Mais la débâcle des Lions Indomptables aux mondial Sud africain (2010) et Brésilien (2014) et sa disqualification au mondial Russe (2018) ont fini par démoraliser le régime Biya de s’hasarder à distraire le peuple avec le foot. C’est trop risqué désormais de vouloir rallier les pseudos patriotes Camerounais autour du foot. Le tapage médiatique autour de l’organisation de la CAN 2019 s’est trop vite estompé suite aux graves menaces de disqualification du Cameroun comme pays organisateur en 2019 à cause des retards sérieux dans la construction des infrastructures qui doivent recevoir cet événement panafricain.

Les amoureux du drapeau et du ballon rond se sont très vite reconvertis en “amoureux de l’armée” dans la crise anglophone. Faut-il s’en réjouir? Pas du tout. Car ce nouveau phénomène nous semble révélateur d’une profonde dérive des esprits et d’une confusion flagrante entre patriotisme et chauvinisme. Les faucons du RDPC ont dangereusement sous -estimé la capacité de résistance farouche des séparatistes anglophones. Beaucoup donnaient deux semaines au BIR pour venir à bout de ces “terroristes”. Malheureusement, on assiste plutôt à un enlisement dans une guerre asymétrique dont l’issue devient incertaine surtout durant l’année électorale.

La sortie de l’ambassadeur Américain qui recommandait au vieux dictateur de songer à la retraite méritée en accusant au passage l’armée camerounaise d’être coupable des assassinats ciblés et de nombreux crimes contre l’humanité est venue jeter le pavé dans la marre! Cela a placé les bâtons dans les roues du régime Biya dans la défensive. Dans un élan de désespoir, l’État tente d’intimider la presse, les réseaux sociaux, et tous les activistes anti guerre en déployant un “McCarthyism” ridicule qui consiste à porter des accusations de subversion et de trahison sans aucune preuve contre les Camerounais de la Diaspora que le régime soupçonne d’être en connivence avec les chancelleries occidentales pour forcer le départ de Biya du pouvoir. Quand on est républicain et démocrate, peut-on être fier d’une armée barbare accusée de graves violations des droits humains tels que décrites dans le rapport de Amnesty International?

En réalité, c’est tout à fait normal d’aimer son pays, comme on aime sa ville, son entreprise ou sa famille. Cela s’appelle le patriotisme. Ce sentiment patriotique implique donc obligatoirement la notion de dévouement, d’abnégation, pour ne pas parler de sacrifice dans les périodes les plus tragiques. Dans une situation de guerre civile, l’armée républicaine ne peut tirer sur des civils. Elle n’a pas à choisir un camp. Le patriotisme passe par le don d’une partie de soi-même, le désintéressement, la capacité à abandonner une part de son intérêt personnel au profit de la communauté. Notre armée en tirant sur les foules, exerce-t-elle son rôle de manière impartiale?

L’accomplissement du service national, supposant le sacrifice de nombreuses années de vie à la patrie, a un sens clairement patriotique. Est -ce le cas pour nos membres du gouvernement actuellement en prison pour de nombreux crimes financiers? Le patriotisme signifie-t-il avoir les coudées franches pour piller l’État dans l’impunité tel que c’est le cas de nombreux commis de l’État sous le Renouveau?
Ce que les griots du RDPC considèrent être du patriotisme  semble plutôt être du “chauvinisme” qui n’a strictement rien à voir avec l’amour du Cameroun. Le chauvinisme ici se définit essentiellement comme un phénomène de nature psychologique lié à un défoulement, un esprit de revanche, qui exalte la supériorité de l’entité à laquelle on s’identifie sur un adversaire. C’est exactement ce zèle égocentrique qui pousse les griots du RDPC à se croire toujours plus patriotes et plus nationalistes contre quiconque tient des positions qui ne sont pas favorables au régime Biya. Ces universitaires de la galaxie RDPC et ces commis de l’administration, esclaves de l’idéologie de confiscation du pouvoir, cultivent cette passion, cette hystérie, cette folie des masses contre les mouvements dissidents favorables au changement. Poussé à l’extrême, leur chauvinisme  débouche sur une forme de haine et de violence qui se retrouve dans le fanatisme. C’est cela qui est à l’origine de la guerre en cours dans le Nord Ouest et le Sud Ouest du Cameroun.

Le vrai sentiment patriotique par contre implique obligatoirement la notion de dévouement, d’abnégation, d’impartialité pour ne pas parler de sacrifice dans les périodes les plus tragiques. C’est cela qui anime chaque Camerounais favorable au dialogue inclusif et consensuel capable de ramener la paix définitive sans disloquer le Cameroun.

Au Cameroun, vous lirez sur des pancartes fantaisistes des slogans du genre: “Fier d’être Camerounais”! “Tous derrière l’armée et son président”, “Je suis l’armée Camerounaise”, “Braves Soldats” etc. Ceux qui expriment mécaniquement cette fierté sont fiers donc de quoi et pourquoi? Est- ce un critère d’excellence et de mérite d’être Camerounais? Ceux qui écrivent des sottises comme ça ont réalisé quel exploit exceptionnel pour justifier une telle fierté?

D’autres encore plus limités nous diront: “Je suis Bamum, Sawa, Beti, Bamileke etc, et fier de l’être”, D’accord, si on regarde bien ces slogans sans substance de trop près, on se rend compte très vite de l’hypocrisie derrière ces déclarations qui cachent plutôt mal le malaise et la discrimination dont ceux qui font ces déclarations sont victimes. Juste le fait de naître par accident dans un groupe ethnique ne peut vous conférer magiquement cette fierté instinctive. Ce qui donne la fierté à une communauté, c’est sa contribution intellectuelle et économique à l’État. L’effort au travail et la bonne réputation qui viennent avec ces efforts multiformes.
La naïve fierté nationale ou tribale me semble être une grosse stupidité. L’on ne doit avoir de fierté que pour des qualités qu’on a acquises grâce aux nombreuses années d’effort pour se surpasser et engranger des distinctions quantitatives et qualitatives. Si vous me dites: “fier d’être pilote, ingénieur, médecin, général etc”, ca se comprend très naturellement. Cela me semble plus raisonnable parce que vous avez fourni un effort pour obtenir ces qualités contrairement aux identités par défaut.

Être camerounais n’est pas une expertise. C’est un accident génétique. On ne peut donc célébrer ou être fier d’un accident génétique. Néanmoins vous êtes libres de dire que vous êtes “contents d’être Camerounais” et non “fiers d’être Camerounais”. On peut remarquer par conséquent que le chauvinisme est ainsi une forme dégénérée du nationalisme agressif et impulsif qui cherche à discriminer cyniquement d’autres Camerounais et les antagoniser dans un rapport conflictuel. Aujourd’hui, le mot de chauvinisme n’a plus vraiment cours, comme si on voulait en effacer la conscience dérangeante. Pourtant, l’enthousiame des foules pour leur équipe nationale de football ou de nos forces armées en temps de guerre cachent très mal l’hypocrisie de beaucoup de Camerounais. Ils relèvent du chauvinisme et non du patriotisme.

Les dirigeants Camerounais avaient bien compris le profit qu’ils pouvaient tirer de l’ “opium du peuple”, le football. Un dérivatif par rapport aux difficultés du temps, un regain de popularité par association entre leur image et les victoires «nationales». Mais au-delà, dans l’inconscient des élites au pouvoir, les exagérations autour du football et le détournement de ce sport, font partie d’une démarche d’abêtissement de masse. Regardez les milliards qu’on veut engloutir dans l’organisation de la CAN 2019 dans un pays si endetté comme le Cameroun.

Au fond, qu’il y a -t-il de plus banal, de pauvre et d’insipide que le spectacle médiatisé de 22 hommes qui gesticulent autour d’un ballon? La promotion du football au rang de culte planétaire est une forme évidente d’abrutissement et de manipulation de masse. «Le football-spectacle n’est donc pas simplement un «jeu collectif», mais une politique d’encadrement pulsionnel des foules, un moyen de contrôle social qui permet la résorption de l’individu dans la masse anonyme, c’est-à-dire le conformisme des automates» (Le football la peste émotionnelle, de Brohm et Perelman, folio 2006).

Est- ce donc un hasard quand le régime Biya a voulu instrumentaliser l’ancienne gloire du football Camerounais Samuel Eto’o Fils, pour intervenir en sapeur pompier dans le chaudron anglophone? Les Camerounais aiment leur pays, sans aucun doute. Le cynisme et l’hypocrisie viennent juste de la part du régime corrompu RDPC qui cherche habilement à opposer les Camerounais les uns contre les autres pour mieux confisquer le pouvoir. C’est au peuple de rester très vigilant.

Laziz Nchare.

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