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FERDINAND NGOH NGOH NE SERA JAMAIS PRÉSIDENT DU CAMEROUN

Le pouvoir informel de Mme Biya est bien plus important que l’acte formel et classique accordé à Ferdinand Ngoh Ngoh, une délégation de signature et non de pouvoir : Concentrons-nous sur l’essentiel

C’est une des signatures de Paul Biya : slalomer comme Messi, étourdissant par des pichenettes l’opinion et finir par atteindre ses objectifs comme Liverpool dans une remontada. Faire le virtuose du ballon comme Jean-Louis Mama et sous les vivats, transformer l’essai tel un Mbida Arantes, oublié de ses adversaires.

La dernière est une affaire qui aurait pu être banale. Une histoire de délégation permanente de signature comme il en existe des centaines dans les archives de la présidence de la République et de l’Etat du Cameroun depuis 1957. Au Cameroun comme sous tous les cieux où la science administrative s’exerce au quotidien. Celui est un acte juridique par lequel une autorité (le « délégant »), délègue non pas ses pouvoirs, mais la faculté de signer des documents et actes énumérés strictement dans la délégation à une tierce personne (le « délégataire »).

Suite, en effet à la publication d’un bulletin d’informations du Cabinet Civil de la PRC, on y découvre un décret du chef de l’Etat, daté du 5 février 2019, accordant une délégation permanente de signature à Ferdinand Ngoh Ngoh en qualité de ministre d’Etat, secrétaire général de la PRC. Ce décret, dont la forme s’impose à Paul Biya, eu égard aux conditions de publicité conférant le caractère exécutoire à l’acte, s’appuie sur des dispositions constitutionnelles. L’article 10 de la Constitution stipule en effet, en son alinéa 2 que  » Le Président de la République peut déléguer certains de ses pouvoirs au Premier Ministre, aux autres membres du Gouvernement et à certains hauts responsables de l’administration de l’Etat, dans le cadre de leurs attributions respectives. En cas d’empêchement temporaire, le Président de la République charge le Premier Ministre ou, en cas d’empêchement de celui-ci un autre membre du Gouvernement, d’assurer certaines de ses fonctions, dans le cadre d’une délégation expresse. ».

En réalité, l’acte est pris en renouvellement de celui du 11 décembre 2011 par lequel la même délégation permanente de signature avait été accordée à Ferdinand Ngoh Ngoh, bombardé Secrétaire Général de la Présidence de la République, deux jours avant, cornaqué par Martin Belinga Eboutou. Comme pour Marafa Hamidou Yaya ou Titus Edzoa hier, cela signifie par exemple que pour nommer des chefs de service au sein de Commissions ou organes rattachés à la Présidence ou prendre des mesures d’organisation des services de la PRC, le Secrétaire général peut engager sa signature, sous le contrôle du délégant, le chef de l’Etat. Comme pour Amadou Ali, Laurent Essoh, il y’a quelques lustres, cela signifie aussi pour éviter l’avalanche de parapheurs sur la table du président, de discriminer un certain nombre de matières dont peut traiter l’assistant qu’est le SGPR.

Il en va autrement de la délégation de pouvoirs, acte juridique par lequel une autorité (le délégant), le président donc, se dessaisit d’une fraction des pouvoirs qui lui sont conférés et les transfère à une autorité subordonnée (le délégataire), selon les hypothèses, le Premier ministre ou le SGPR. Le délégataire assume alors les obligations et les responsabilités liées aux pouvoirs qui lui ont été délégués, aussi, en cas de manquement à une obligation pénalement sanctionnée, le délégataire sera responsable en lieu et place du délégant.

C’est bien ce qu’explique Jean-Marie Atangana Mebara, autre ancien SGPR, dans un ouvrage fort documenté, verbatim de son expérience à cette fonction : Le Secrétaire général de la Présidence de la République, Entre mythes, textes et réalités. Il y évoque, dans cette matière, au détail près, l’exercice par Paul Biya de pouvoirs délégués par Ahmadou Ahidjo à chaque fois qu’il se rendait à l’étranger notamment pour des raisons médicales. Si cela advenait, cela signifierait que le SGPR, au lieu de se limiter à soumettre des propositions de nominations d’ambassadeurs, d’officiers supérieurs ou généraux de l’Armée, dans les domaines dits réservés de la diplomatie et de la Défense, prendrait des actes de nomination. Ce n’est pas encore le cas…

Dans notre pays, il y’a bien plus, à la Présidence, des pôles informels de pouvoir, bien plus influents, comme celui de Chantal Biya qui n’ont pas besoin d’un décret. C’est cela le vrai sujet, celui sur lequel nous devons exercer un regard citoyen et une véritable mobilisation pour que le Cameroun nouveau se défasse de telles pratiques.

Pour le cas Ngoh Ngoh, que Paul Biya avait d’ailleurs démis avant l’intervention de Chantal BIYA comme pour Louis-Paul Motaze, rival du SGPR, qui avait obtenu le poste, ils vivent les  » derniers jours  » – qui peuvent prendre quelques années encore – d’un condamné. Car, Paul Biya scellera leur sort comme celui de précédents collaborateurs, autrement plus puissants : limogeage et bagne au besoin. Après la diversion des signatures, revenons donc à l’essentiel !

A. Moundé Njimbam

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