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ACHILLE MBEMBE GIFLE FAME NDONGO AVEC SON PASSEPORT VILLAGEOIS

Je suis désolé de vous agacer. Beaucoup d’entre vous savent que de nombreux citoyens camerounais éprouvent d’enormes difficultés à renouveler leurs documents d’identification. C’est le cas du passeport, mais aussi de la carte nationale d’identite.

J’en fais partie.

Pendant longtemps, je ne m’en suis jamais plaint publiquement. Depuis un moment, j’ai décidé de le faire savoir. D’abord discrètement, en prenant à témoin des personnalités dont on ne saurait mettre en question les hautes qualités morales. C’était en 2016. Puis en public, plus récemment.

Au nom du RDPC (le parti au pouvoir au Cameroun), le Professeur Jacques FAME NDONGO vient de se prononcer sur mon cas, sur la base d’informations manifestement partielles.

Le Professeur livre des détails au sujet du passeport établi en 2018 et qui, à peine un an plus tard, c’est-a-dire en 2019, ne dispose plus d’aucune page libre et ne sert donc strictement à rien. Il s’agit donc d’un passeport objectivement périmé.

Le fait est qu’après avoir attendu, des mois durant, qu’il soit délivré au Consulat du Cameroun à Pretoria comme de coutume, j’avais été obligé de prendre l’avion à mes propres frais et de me rendre a Yaounde aux fins de “suivre le dossier” – malheureux euphémisme dont, peut-être, seul mon compatriote Jacques FAME NDONGO ne connait guère la signification. Ses explications – en réalité une apologie peu convaincante du gouvernement – ne sont donc pas d’une grande utilité.

La vérité est qu’à l’heure où  je vous parle, ma demande de renouvellement du passeport de 2018 (aujourd’hui objectivement périmé) n’a toujours pas été honorée. Il en est de même de la demande de renouvellement de ma carte d’identité déposée en avril 2018.

Si le President MACKY SALL ne m’avait pas octroyé un passeport diplomatique sénégalais, j’aurais été contraint de changer de nationalité.

Je n’ai ni le temps, ni l’envie d’entretenir quelque polémique que ce soit avec qui que ce soit.

Si, comme le suggère le Professeur FAME NDONGO, le régime au pouvoir n’instrumentalise pas les papiers d’identification comme levier pour le harceler ou réprimer les dissidents, alors que l’administration renouvelle mon passeport et que l’on passe à autre chose.

Encore faut-il souligner que loin d’être privé, ce problème est structurel.

Entre 1999 et 2011, le passeport ordinaire camerounais comptait 48 pages dont 38 étaient réservées aux visas et 7 à des signalements divers.

A partir de 2011, le nombre de pages a été réduit a 32 dont 28 sont consacrées aux visas. En d’autres termes, il suffit de 28 voyages dans des pays ou un visa est exige des Camerounais pour qu’un passeport soit objectivement périmé.

Pour ceux et celles d’entre nous qui travaillons sur l’international, la durée de vie d’un passeport est de plus en plus réduite, ce d’autant plus qu’a cause d’une diplomatie moribonde, les Camerounais ont besoin de visas pour se rendre dans la quasi-totalite des pays du monde.

Or, il suffirait d’un peu d’imagination pour satisfaire les citoyens et se doter de services efficaces, voire rentables.

L’on pourrait par exemple diversifier les modèles de passeports en fonction des taux de consommation. Un document de 48 pages pourrait être propose aux “grands consommateurs” de passeports moyennant un prix un peu plus élevé.

Les délais varieraient par ailleurs. Les prix aussi. Les frais pour un passeport délivré en moins de 10 jours, par exemple, seraient plus élevés que les frais pour un passeport délivré en trois mois.

Le Trésor public en sortirait renfloué. Les citoyens seraient satisfaits. Et ce regime qui ne sait manier que le gourdin, l’intimidation et l’esbroufe pourrait gagner en légitimité.

Achille Mbembe

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