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ALASSANE OUATTARA ANNONCE LE RETOUR AU FRANC CFA

Le 21  décembre 2019, à Abidjan, le président français Emmanuel Macron et son homologue ivoirien Alassane Ouattara avaient créé la surprise et un certain émoi en déclarant solennellement la fin du franc CFA et son remplacement rapide par l’éco. L’annonce s’inscrivait dans le cadre d’une refonte des relations monétaires entre Paris et les huit pays de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) que sont le Bénin, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, la Guinée-Bissau, le Mali, le Niger, le Sénégal et le Togo. Et maintenant, plus rien.

Le président de la République de Côte d’Ivoire, Alassane Ouattara a annoncé, lundi 7 septembre à Abidjan, la décision de la 57ème session ordinaire de la Conférence des chefs d’État et de gouvernement de la CEDEAO de procéder à la mise en œuvre de la monnaie ECO dans un délai compris entre trois et cinq ans.

Dans son compte rendu des mesures liées à la coopération monétaire de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao), le président Ouattara a rappelé que la réforme au sein de l’Union économique et monétaire ouest africaine (UEMOA) avait pour but « d’effacer les liens avec le Trésor français et la présence des Français dans les structures de l’UEMOA » pour maintenir, dans un premier temps la garantie et la parité fixe avec l’euro.

 

« Quand l’ECO sera arrêté, nous pourrons rentrer dans une évolution vers un taux de change flexible et avoir une banque centrale fédérale », a-t-il déclaré .

« L’ECO en tant que monnaie scripturale ou fiduciaire ne pourra pas voir le jour avant une période de trois à cinq ans. Pendant cette période, bien évidemment, nous continuerons d’utiliser le franc CFA, qui est une bonne monnaie, appréciée de tous et surtout des pays voisins », a plaidé  le Président ivoirien à l’aéroport Félix Houphouet Boigny

Le franc CFA qu’on croyait renvoyé aux calendes grecques reste comme solution intermédiaire en attendant la mise en place l’ECO, a soutenu le président ivoirien.

Depuis l’annonce de la nouvelle monnaie Éco , Paris a accéléré la mise en œuvre de ce projet à forte teneur symbolique. Le projet de loi qui entérine la réforme a été adopté fin mai en conseil des ministres. Selon le texte, la Banque centrale des Etats d’Afrique de l’Ouest ne sera plus tenue de verser 50 % de ses réserves de change dans un compte logé auprès du Trésor français, un mécanisme qui était vécu comme une dépendance humiliante.

Le 23 juin, Muhammadu Buhari, le président du Nigeria, a lâché une nouvelle salve de critiques sur Twitter en exprimant son « sentiment de malaise que la zone UEMOA souhaite reprendre l’éco en remplacement de son franc CFA avant les autres Etats membres de la Cédéao ». « Il est préoccupant que des gens avec lesquels nous souhaitons intégrer une union prennent des mesures importantes sans nous faire confiance pour en discuter », a-t-il déclaré.

Jouant le rôle du pompier, George Weah, président du Liberia, a appelé, dans la foulée, à la création d’un « comité spécial » pour discuter avec l’autre partie, jugeant que la seule façon de sortir de « l’impasse actuelle est de promouvoir un dialogue entre les blocs francophones et anglophones ». Une tâche qui s’annonce particulièrement ardue.

Paris et Abdijan ont-ils eu tort de forcer le destin monétaire de la région ? « Sur le fond, Buhari a raison : une décision avait été prise à quinze pays et on constate que huit d’entre eux vont très vite, sur la base de principes qui ne sont pas ceux sur lesquels on s’était mis d’accord, juge l’économiste togolais Kako Nubukpo, connu pour ses positions anti-franc CFA. Ce qu’il faudrait désormais, c’est profiter du traité entre la France et les pays de l’UEMOA pour annoncer le plan d’action pour après : va-t-on aller vers un taux de change flexible ? Que veut-on faire de la garantie française ? »

Le Nigéria , qui représente 70 % du PIB de la Cédéao et plus de la moitié de sa population, serait alors en position de force. Seulement, la réforme telle qu’elle a été pensée jusque-là contraindrait Abuja à ne plus faire fluctuer le naira en fonction des cours du pétrole, à contrôler son inflation et à maintenir son déficit public en dessous de 3 %. Des exigences auxquelles le géant anglophone, qui s’est recentré sur un agenda national depuis l’élection de M. Buhari, n’est pas prêt à se plier. Il faudrait encore attendre au moins une dizaine d’années pour espérer la naissance de l’Eco. Quand Alassane Ouattara et Buhari ne seront plus présidents de leur pays.

 

« Quand l’ECO sera arrêté, nous pourrons rentrer dans une évolution vers un taux de change flexible et avoir une banque centrale fédérale ». Quand ? L’annonce de la mort du franc CFA n’était qu’un coup politique.

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