Opinion

CÉLESTIN BEDZIGUI DEMANDE À PAUL BIYA DE LIBÉRER LES PRISONNIERS POLITIQUES DE SON GOULAG

 

Par Sa Majesté Célestin Bedzigui

La République du Cameroun aurait-elle une face cachée ? Celle d’un « goulag », nom donné par Solyenetsine sous le régime soviétique au système des centres de détention de prisonniers politiques disséminés à travers l’immensité du territoire de l’URSS.

Un goulag kamer ? La réponse à cette grave question pourrait, malheureusement et honteusement, être positive, si l’on s’en tient au constat objectif du réseau des prisons centrales, prisons secondaires, prisons annexes, centres de tortures des services de renseignements dans lesquels des compatriotes sont embastillés depuis la marche pacifique de Septembre 2020, marche par laquelle certains pensaient pouvoir exercer le droit à la liberté d’opinion que la Constitution confère à tous les citoyens de ce pays. D’autres ont été enlevés à leur domicile, soupçonnés du crime d’avoir des accointances avec les marcheurs. Ils seront pour la plupart, ensuite traduits devant la cour martiale de la République. A croire que marcher est une atteinte à la sécurité intérieure de l’Etat. Un cas unique sur la planète terre, où comme dans l’œuvre majeur de Kafka, le Procès, l’absurde le dispute à l’iniquité.

Cette marche avait été interdite par l’autorité administrative et la transgression de cette interdiction ne saurait ne pas prêter à conséquence diront les contempteurs de cette mesure. Soit. Mais cet argument tombe sous le coup du principe de proportionnalité qui impose en droit ou en bon sens son « imperium ». Ainsi, transgresser l’interdiction d’une marche ne peut relever que d’un délit, les Américains parleraient de  » misdemeanor », qui peut donner lieu à une garde à vue de quelques heures et éventuellement à une contravention pécuniaire. Cette transgression ne peut, dans une République Exemplaire, être qualifiée de crime (les américains parleraient de « felony »), porté devant un Tribunal Militaire qui est une cour martiale pouvant prononcer une peine de mort ou être passible d’une privation de liberté prolongée. La disproportion ici constatée révèle une volonté manifeste de bâillonner toute expression ou manifestation d’une opinion contraire, signant ainsi un acte politique et faisant de ceux qui en subissent l’effet par la privatisation de liberté, des prisonniers politiques.

Voilà le tableau qui justifie aujourd’hui notre prise de parole, autant pour éveiller l’attention du peuple sur un crime qui est entrain d’être commis sous ses yeux, que pour en appeler à la responsabilité politique et morale de celui-là à qui, des collaborateurs infligés de myopie politique à qui il a laissé choir les rennes de l’État, font croire qu’il est le bénéficiaire de telles forfaitures : le Président de la République.

En vérité, c’est la prise en compte de l’appartenance politique et tribale de tel ou tel citoyen qui pour certains déterminent les initiatives, les mesures et les postures qui sont ici à l’œuvre, le résultat étant un ensauvagement de la culture et de la gouvernance politique au Cameroun. Un constat très triste. Cela ne se devrait absolument.

Par exigence politique d’équilibre, autant nous avons fermement condamné en leur temps des comportements attentatoires au respect des autorités constituées lorsque surtout elles séjournent à l’étranger, manifestations à travers laquelle certains voyaient déjà une dérive tribaliste, autant nous dénonçons ici le contrecoup que certains individus à l’esprit retors ont voulu donner à ces événements en infligeant un traitement abusif à des citoyens dont ils ont faits prisonniers politiques dans un État qui est censé leur garantir, en guise de paquet minimum la liberté et la sécurité… Pour certains, il ne s’agit ni plus ni moins que de la réponse du berger à la bergère. Lorsque que l’appareil judiciaire peut-être ravalé au rôle d’instrument de remontrance politique au lieu d’être au service du droit, on est en droit de s’interroger sur les repères et les valeurs de la République.

Cette pratique pour le moins honteuse, nous amène à critiquer non seulement l’État qui les perpètre, mais aussi à relever pour les dénoncer la torpeur et le lâche silence de notre peuple rendu veule par la somnolence enivrante d’une la passivité civique unique au monde. Ce n’est donc pas seul le régime en place qui est ici à blâmer. C’est aussi notre peuple et ses leaders, tous possédés par la permanence d’arrière-pensées tribalistes, qui nous ont conduits dans le véritable marécage politique actuel où ceux qui ont en main les leviers de l’État croient pouvoir tout faire de la puissance publique en brouillant tout sens et toute mesure. En réalité, le Cameroun est aujourd’hui soumis à une hégémonie culturelle au sens de Gramsci, un système où prévaut l’acceptation par le peuple du viol consentant permanent par lequel il accepte que les droits fondamentaux soient déniés aux citoyens sans que cela ne prête à conséquence. Il faut que soit répudié cet état de fait dans l’esprit autant des gouvernants que des gouvernés dans notre pays.

Voici ci suit le tableau sinistre qui expose le Cameroun à perdre son honneur: Ils sont 136 citoyens au décompte du 21 Décembre 2020 en ma possession, poursuivis pour délit d’opinion, ce qui fonde leur qualité de prisonniers politiques. disséminés à travers l' »archipel du goulag » camerounais Le goulag camerounais s’étale ainsi dans toute sa laideur et son horreur à la prison centrale de Bafoussam sous la juridiction du Tribunal Militaire de Bafoussam, à la prison centrale de New Bell sous la juridiction du Tribunal militaire de Douala, à la Prison Centrale de Nkonsamba sous la juridiction de la Cour d’appel du Littoral, à la Prison Centrale de Mfou sous la juridiction de la Cour d »appel du Centre Yaounde, à la prison centrale de Kodengui sous la juridiction du Tribunal de Yaounde Ekounou… Ces citoyens ainsi dispersés et incarcérés ont été arrêtés et détenus à la suite des manifestations de septembre 2020.

Nous sommes face à un déni flagrant d’un droit constitutionnel, orchestré par des esprits étriqués qui se sont illustrés comme des architectes sataniques d’une législation scélérate où marcher pacifiquement est assimilé à une atteinte à la sureté de l’Etat, une incongruité juridique unique au monde. Ne voyons-nous pas tous les jours à la télévision des populations marcher et manifester à travers les rues des villes du monde, sans subir le terrorisme d’état légal dont sont aujourd’hui victimes les citoyens de notre pays?

Embastiller ainsi des êtres humains qui ont voulu exprimer une opinion, en marchant, en écrivant, ou en manifestant, en faire des prisonniers politiques est dans son essence un crime contre leur humanité, un crime contre l’humanité tout simplement.

Le Cameroun se prépare à accéder au toit du monde à travers la Coupe d’Afrique des Nations Total Energies 2021. Les clameurs de cet événement ne devraient pas être accompagnées des gémissements dissonants, des gémissements qui nous parviennent du goulag camerounais qui, pour cette raison doit être démantelé hic et nunc, ici et maintenant.

C’est la raison pour laquelle je me tourne vers « ce citoyen », qui est censé le comprendre le mieux, lui le « primus inter pares », premier parmi ses concitoyens, pour lui dire: Maintenir en détention ces concitoyens pour délit d’opinion ne vous sert pas. Au contraire, cet état de fait porte atteinte à l’honneur et la crédibilité du Cameroun. Pour remédier à ces dégâts inutiles de se sur l’image de notre pays, ordonnez l’arrêt des poursuites contre ces compatriotes. Président Biya, libérez ces prisonniers politiques.

Sa Majesté Célestin BEDZIGUI
Élu local ,
Président du PAL, Parti de l’Alliance Libérale

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