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DEUX PAYS AFRICAINS REFUSENT DE VENDRE LEUR CACAO AUX OCCIDENTAUX

Grève du chocolat ou chocolat plus cher? La Côte d’Ivoire et le Ghana, qui représentent ensemble les deux tiers du marché mondial du cacao (62%), ont lancé une offensive médiatique sans précédent contre des multinationales du chocolat. Elles accusent de ne pas vouloir payer une prime spéciale pour mieux rémunérer les planteurs, dont beaucoup vivent dans la misère.

Dans des courriers divulgués aux médias et un communiqué de presse lundi, le Conseil Café Cacao (CCC) de Côte d’Ivoire et le Ghana Cocoa Board (Cocobod), les organes publics de gestion des filières cacao de ces deux pays ouest-africains, ont reproché à Mars et Hershey, deux géants chocolatiers américains, d’acheter du cacao ou du beurre de cacao sans payer le différentiel de revenu décent (DRD), la prime de 400 dollars par tonne de cacao (en sus du prix du marché) pour les planteurs, négociée l’an dernier.

C’est une initiative publique sans précédent de la part de ces institutions qui d’ordinaire ne communiquent quasiment pas, les marchés du cacao étant particulièrement opaques. Pour augmenter la pression, des marches de planteurs de cacao doivent être organisées simultanément en Côte d’Ivoire et au Ghana jeudi.

Le CCC et le Cocobod ont de plus annoncé la suspension immédiate de tous les programmes de certification de Hershey dans les deux pays, là aussi une mesure inédite et potentiellement lourde de conséquences.

Les programmes de certification des chocolatiers visent à garantir qu’ils achètent du cacao « durable » respectant des critères de production éthiques (n’entraînant pas de déforestation ou ne recourant pas au travail des enfants notamment). Ils sont un élément de communication et de marketing important en direction des consommateurs occidentaux.
La Côte d’Ivoire, où le président Alassane Ouattara vient d’être réélu, et le Ghana, où le président Nana Akufo-Addo vise une réélection le 7 décembre, jouent ostensiblement sur la corde sensible, dénonçant même un « complot » des multinationales du chocolat pour « appauvrir » les quelque « trois millions de paysans ouest-africains ».

Hershey et Mars ont protesté de leur bonne foi, assurant payer le DRD et soutenir les petits planteurs.

Cette offensive conjointe de la Côte d’Ivoire (qui représente plus de 40% de la production mondiale d’ »or brun ») et du Ghana (plus de 22%), survient alors que sur le terrain la situation est « préoccupante » pour les planteurs, selon Moussa Koné, président du Syndicat national agricole pour le progrès en Côte d’Ivoire, un des principaux syndicats de cacaoculteurs. Le prix de 1 000 francs CFA (1,5 euro) par kilo de fèves de cacao décidé conjointement par la Côte d’Ivoire et le Ghana pour la récolte 2020-21 (en hausse de 20%) est « trop élevé » et il n’est « pas respecté par les acheteurs », explique-t-il.

Les planteurs des pays tropicaux sont les parents pauvres du secteur : ils ne perçoivent que 6% des 100 milliards de dollars par an que représente ce marché mondial du cacao et du chocolat, verrouillé par les grands industriels.

En Côte d’Ivoire, plus de la moitié d’entre eux vivent sous le seuil de pauvreté, selon une étude de la Banque Mondiale, alors que le cacao fait vivre 5 à 6 millions de personnes. La situation est comparable au Ghana, où quelque 800 000 familles vivent, ou plutôt , survient grâce au cacao.

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