ENCORE UN GRAND ARTISTE MORT DANS L’ABANDON

Claude Ndam. Mort, où est ta victoire!?

On s’est connu par le canal de Narcisse Kouokam et Essindi Mindja. Bien sûr que je le voyais à la télé, après le succès de U nguo ya, le titre qui l’a hissé parmi les grands de son art au Cameroun.

Quand, malade, Essindi Mindja se retrouve dans un état critique, c’est Claude Ndam et Narcisse Kouokam qui viennent nous retrouver, Léo Leopold Ngbwao et moi, dans notre bureau à la Sociladra. Ce ne sont pas les administrateurs de la Société de droits d’auteur qu’ils viennent voir. Ils viennent consulter les amis. Léo a souvent été le manager d’Essindi et moi, il m’a souvent fait l’honneur en dehors de nos escapades de célibataires endurcis à l’époque, d’accepter que je partage la scène avec lui dans la création des pièces de théâtre dont la toute dernière fut Femme lune, coécrite avec Angeline Solange Bonono et Joël Eboueme.
Claude et Narcisse souhaitent qu’on mette sur pied une initiative qui permette la levée de fonds pour une évacuation de notre vieux frère. C’est dans ce bureau que nous convenons d’aller en parler à Bassek ba kobhio et de lui proposer de porter la difficile initiative.

Il y a eu tout un spectacle autour de cette initiative mais jamais Claude et Narcisse n’ont tenté de s’en attribuer la paternité. Certaines personnes reconnues comme experts en récupération avaient tôt fait de scotcher autour de Bassek. On a presque jamais vu Narcisse et Claude se bousculer devant les caméras..
Comme Narcisse et Essindi, Claude était un gars d’une surprenante humilité, quoiqu’immensément talentueux…
Un matin de poisse à Yaoundé, alors qu’on venait à peine de se réveiller, c’est la voie grave de Claude qui nous a annoncé au téléphone: « Essindi est mort ». Certainement pour éviter toute conversation, il a ajouté, « Rosalie (l’épouse d’Essindi) vient de m’appeler ». Il raccrocha. La douleur était intense.
Au réveil ce matin, sur Facebook, j’ai vu un puis deux posts annonçant la mort de Claude. Je sais que Facebook tue beaucoup de gens ces derniers temps Je veux espérer que ce soit encore un fake. J’écris à Narcisse : « est-ce vrai pour Claude ? ». Sa réponse me rappelle la voix du même Claude nous annonçant le décès d’Essindi: « Je me réveille là avec cette nouvelle, mon frère. Oui, Claude était très malade ».
La longue conversation que nous avons eue quelques temps après a confirmé la triste nouvelle et surtout nous a rappelé la belle époque de sa carrière, sa collaboration avec le défunt, nos moments d’amitié et de fraternité. On s’est surtout rendu compte que beaucoup de notre cercle sont déjà partis avec leur talent: Keki Manyo, Essindi, Mindja, Jimmy Biyong….

Talent, générosité, humilité caractérisaient ces géants de la scène qui pouvaient accepter un cadet comme moi parmi eux et le considérer non pas comme un « petit » mais comme un ami et frère…..Malheureusement, la société où nous évoluions n’avait pas prévu un cadre pour leur épanouissement matériel. Eux-mêmes n’y pensaient qu’après avoir donné….
Claude, Comme beaucoup d’autres avant toi, tu es parti alors que tu avais encore beaucoup à donner.
Tu as beaucoup donné sans presque rien recevoir.
Ton héritage nourrira des générations entières. Et c’est ça, la victoire que tu auras eue sur la mort.

Repose en paix, vieux frère.

Venant Mboua