ÉVACUATION DE 2500 ÉTRANGERS SOUS LES FLAMMES AU STADE DE FRANCE
L’évacuation d’un camp abritant près de 2500 migrants situé à Saint-Denis, au pied du célèbre Stade de France, en Seine-Saint-Denis, a débuté vers 7 heures du matin ce mardi.
Elle a été perturbée par plusieurs feux. La police a utilisé des gaz lacrymogènes. Les migrants ont dû se protéger par les masques ou les écharpes. Par mesure de sécurité, la ligne 13 du métro a été coupée et ne dessert plus la station Saint-Denis Porte de Paris, et ce jusqu’à 12h.
Environ 2000 à 2500 personnes ont été délogées et devraient être mises à l’abri dans des centres d’accueil et des gymnases d’Ile-de-France.
« La police a bouclé le périmètre tôt ce matin », explique sur notre antenne Alix Geoffroy Cedre, bénévole pour le Secours catholique. « Beaucoup sont inquiets de ne pas savoir ce qui va se passer après. Rien ne leur a été communiqué. »
Dès 4H30, des migrants, munis de leurs affaires attendaient d’être pris en charge et de monter dans des bus, dans une opération conjointe de la préfecture de police de Paris, de la préfecture de la région Ile-de-France et de Seine-Saint-Denis. En tout, 70 bus devaient acheminer les migrants alors que 26 centres d’hébergement ont été mis en place par la Préfecture de région d’Ile de France (Prif) pour les accueillir.
Les premières tentes avaient été installées mi-septembre dans ce campement situé à quelques mètres du stade de France et qui a rapidement pris de l’ampleur. Environ 2000 personnes, majoritairement originaires d’Afghanistan, y vivent dans des conditions insalubres.
« Ces camps ne sont pas acceptables » a déclaré lors d’un point presse le préfet de police de Paris, Didier Lallement. « Cette opération a lieu pour faire en sorte que les personnes en situation régulière soient mises à l’abri et celles en situation irrégulière n’ont pas vocation à rester sur le territoire », a expliqué le préfet.
Toutes les personnes prises en charge feront dans un premier temps l’objet d’un test au Covid-19 dans des centres de dépistage mis en place par l’ARS, avant d’être soit isolées dans un premier temps, en cas de résultat positif, soit immédiatement mises à l’abri.
Lors du premier confinement, entré en vigueur le 17 mars, un important camp de 700 migrants situé à Aubervilliers, avait été démantelé le 24 mars. La précédente évacuation remontait, elle, à juillet, dans la ville voisine d’Aubervilliers. Les premières tentes sont apparues à Saint-Denis, toujours le long du canal, dès la mi-août.
Là, le campement de fortune, où des centaines de tentes s’étaient progressivement installées, était majoritairement constitué d’hommes seuls, originaires en grande majorité d’Afghanistan, mais également du Soudan, d’Ethiopie et de Somalie. Beaucoup sont auparavant passés par d’autres campements à Paris, successivement démantelés.
Comment ce campement a pu se développer en état d’urgence sanitaire, où le respect des gestes barrière est impossible et où les personnes vivent dans l’insalubrité totale ? Ces personnes sont confinées dehors », regrette Louis Barda, coordinateur général à Médecins du Monde Paris.
Alix Geoffroy, chargée de programme CEDRE-Secours catholique, à la fois « soulagée » et « inquiète » par cette mise à l’abri souhaite qu' »il y ait une pause de la rue pour ces personnes le temps du confinement ». « Le prochain campement sera-t-il encore plus éloigné en banlieue, éloigné des douches, des distributions alimentaires et des démarches administratives ? », se demande-t-elle.
Début octobre, Médecins sans frontières a publié une enquête sur le niveau d’exposition au virus parmi les grands précaires, sur un échantillon de 800 personnes testées par l’ONG dans différents centres d’Ile-de-France. L’étude révèle de fortes disparités selon les types de sites sur lesquels les personnes ont été testées: ainsi, dans les 10 centres d’hébergement où elle intervient, le taux de positivité atteint 50,5%, contre 27,8% sur les sites de distribution alimentaire et 88,7% dans les deux foyers de travailleurs migrants.
La raison principale est la « promiscuité et les conditions d’hébergement qui ont généré des clusters », par exemple dans les gymnases où ces personnes ont été mises à l’abri à l’aube, rapporte l’étude.
Dans un communiqué publié mardi, une trentaine d’associations et collectifs, comme la Cimade ou Solidarité Migrants Wilson dénoncent le « cycle sans fin et destructeur » des évacuations.