FREDERIK DE KLERK DEMANDE PARDON AUX NOIRS APRÈS SA MORT
« Laissez-moi vous dire que depuis les années 1980, mes convictions ont changé. Il est vrai que dans ma jeunesse, j’ai défendu le système de développement séparé, comme nous avons préféré l’appeler. À de multiples reprises, j’ai présenté mes excuses. Beaucoup m’ont cru, mais d’autres non. »
C’est une vidéo de 7 minutes présentée comme les derniers mots de Frederik de Klerk, décédé jeudi des suites d’un cancer. L’ancien président sud-africain y apparaît âgé et amaigri, la voix cassée, fait ses confessions et demande pardon pour le système d’apartheid et le mal commis contre les Noirs.
Quelques heures après sa mort, la fondation de l’ancien président sud-africain Frederik de Klerk publie une vidéo dans laquelle il s’excuse pour les crimes commis sous l’apartheid.On aperçoit en arrière-plan, dans une pièce de sa résidence, une photo de lui et de son épouse, et une peinture représentant une femme noire.
Il réitère donc dans cette vidéo : « Je m’excuse sans réserve pour la douleur, la souffrance, l’indignité et les dommages que l’apartheid a causés aux Noirs, aux métis et aux Indiens en Afrique du Sud. »
En Afrique du Sud, son absence de repentance, dans les années 1990 et par la suite, était critiquée. Notamment devant la commission Vérité et réconciliation, où Frederik de Klerk avait minimisé les crimes du régime d’apartheid.
Il en avait une conscience douloureuse, lorsque, peu avant de s’éteindre, miné par le stade terminal de son cancer, il avait décidé d’enregistrer une déclaration, son « dernier message », destiné à être posthume. Cette vidéo a été diffusée jeudi 11 novembre, quelques heures après sa mort. Frederik De Klerk, venait de disparaître à 85 ans, mais avait encore des comptes à régler avec la postérité. L’ex-président sud-africain avait reçu le prix Nobel de la paix en 1993, conjointement avec Nelson Mandela, pour avoir amené le pays vers la démocratie multiraciale au lieu de sombrer dans un bain de sang.
Frederik Willem De Klerk ne serait jamais entré dans l’histoire sans Nelson Mandela, l’icône de la lutte anti-apartheid dont il a permis la libération après vingt-sept ans d’emprisonnement. Mandela est mort il y a déjà huit ans, mais l’aura de De Klerk reste à jamais liée au duo inattendu qu’il aura formé, lui le dernier président blanc d’Afrique du Sud, avec le premier président noir du pays qui lui succède en 1994. Un an plus tôt, les deux hommes avaient reçu conjointement le prix Nobel de la paix, consacrant ce qu’il était convenu d’appeler à l’époque, «le miracle sud-africain».
Dans sa maison du quartier huppé de Fresnaye au Cap où il est mort, De Klerk se trouvait d’ailleurs à quelques encablures du Parlement sud-africain, où le 2 février 1990, il avait prononcé ce discours resté célèbre et qui fera l’effet d’un coup de tonnerre : «L’heure des négociations est arrivée», martèle alors d’une voix forte cet Afrikaner.
Visionnaire pour les uns, traître pour les autres, le libérateur de Nelson Mandela a toujours eu l’intime conviction qu’il était le dernier recours pour sauver le peuple afrikaner de l’impasse politique dans laquelle il s’était mis. Il restera en tout cas dans les annales de l’Histoire comme «l’homme qui a aboli l’apartheid».
Il accompagne pendant deux ans la jeune démocratie en devenant vice-président du premier président noir dans le pays. Mais en 1996, il démissionne, reprochant à la nouvelle Constitution de ne pas garantir aux Blancs qu’ils puissent continuer à partager le pouvoir. L’année suivante, il abandonne la présidence du Parti national et entame son retrait de la vie politique. Né le 18 mars 1936, Frederik De Klerk a toujours évolué dans les milieux nationalistes afrikaners, descendants des premiers colons européens qui parlent une langue dérivée du hollandais.
En 2020, il avait déclenché une vive polémique en niant que l’apartheid ait été un crime contre l’humanité, avant de présenter des excuses.
Il est mort chez lui ce jeudi 11 novembre le jour même de ses 85 ans, «paisiblement», selon la fondation FW de Klerk, des suites d’un cancer.