Lundi 21 septembre, cinq ans après les faits, le tribunal militaire de Yaoundé a condamné cing militaires à des peines d’emprisonnement pour « assassinat ». Le gouvernement avait d’abord nié l’implication de son armée, avant de faire arrêter sept suspects. Tous avaient plaidé non coupable mais seulement deux ont été acquittés.
Le drame s’était déroulé en 2015 dans la localité de Zeleved, dans l’Extrême-Nord du Cameroun, où le groupe jihadiste nigérian Boko Haram et une branche dissidente multiplient les attaques meurtrières ces dernières années contre les civils et l’armée.
Lorsque la vidéo était devenue virale sur les réseaux sociaux en 2018, le pouvoir du président Paul Biya, à la tête du Cameroun depuis 1982, ainsi que l’armée avaient fermement nié l’implication de leurs soldats, parlant de « fake-news » et d' »horrible trucage ». Mais il s’était rétracté en août 2018, annonçant l’arrestation de sept militaires.
Lundi 21 septembre, le tribunal militaire de Yaoundé a prononcé son verdict après de très nombreux ajournements du procès.
Trois militaires, Ciriaque Hilaire Bytlaya, Jean Tchanga et Barnabas Donossou, ont été reconnu « coupables des faits de coaction d’assassinat », avant d’être condamnés chacun à 10 ans de prison ferme.
La même peine a été infligée au capitaine Étienne Fabassou, chef des accusés au moment des faits, reconnu coupable de « complicité d’assassinat ».
Un cinquième militaire, Ghislain Ntienche, a, pour sa part, écopé de deux ans de prison ferme pour « violation de consignes » dans le cadre de la même affaire.
L’avocat du capitaine Fabassou a déjà annoncé qu’il comptait faire appel. Selon lui, la procédure judiciaire n’a pas été suivie car « de l’enquête à la phase de jugement en passant par l’information judiciaire, les ayants-droits des victimes n’ont jamais comparu et n’ont pas été entendus ».
Les attaques dans l’Extrême-Nord sont le fait de Boko Haram ou de l’Iswap (le groupe État islamique en Afrique de l’Ouest, selon son acronyme en anglais), qui multiplient, ces dernières années, les assauts très meurtriers visant les militaires et les civils dans cette région du Cameroun comme dans les régions limitrophes du Nigeria, du Tchad et du Niger, sur le pourtour du lac Tchad.
Les organisations internationales de défense des droits humain dénoncent également régulièrement des exactions et crimes commis contre des civils par les forces de sécurité au Cameroun, dans l’Extrême-Nord mais aussi dans les deux régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest. Dans ces deux régions à majorité anglophone, l’armée affronte depuis trois ans des groupes indépendantistes armés.
En février, trois militaires camerounais ont été inculpés de l' »assassinat » d’au moins 23 civils selon l’ONU, dont 10 enfants, dans un village des zones anglophones, Ngarbuh, un massacre qui avait déclenché un tollé international, contraignant le pouvoir à admettre la responsabilité de ses soldats, après l’avoir longtemps niée.