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LE CHAUFFEUR DU COMMANDO ET UN AMBASSADEUR BALANCENT COMPAORÉ POUR L’ASSASSINAT DE SANKARA

Premier des accusés à s’exprimer devant le tribunal militaire de Ouagadougou qui juge les assassins présumés du « père de la révolution burkinabè » Thomas Sankara en 1987, un soldat a reconnu mardi les faits d' »attentat à la sûreté de l’État » et raconté les détails de l’assassinat.

Ce soldat, Yamba Élisée Ilboudo, a raconté que le 15 octobre 1987, jour du coup d’Etat au cours duquel Thomas Sankara et 12 de ses compagnons ont été t*és, il se trouvait « au domicile de Blaise Compaoré », porté au pouvoir par le putsch.

« C’est chez M. Compaoré que Hyacinthe Kafando, qui nous commandait en tant que chef de sécurité, m’a demandé de démarrer un véhicule pour nous rendre au conseil de l’Entente », le siège du Conseil national de la Révolution où s’est produite la tuerie, a-t-il dit.
Arrivés sur place, Kafando et « Maïga, qui conduisait lui le véhicule de Blaise Compaoré, sont descendus et ont tiré en désordre », a affirmé à la barre le soldat de première classe, aujourd’hui âgé de 62 ans, sans indiquer le prénom de ce dernier.

Celui qui affirme être resté dans son véhicule, sans tirer, raconte ensuite les détails de l’assassinat. Après les premiers tirs, il a vu de Thomas Sankara « sortir de la salle de réunion, les mains en l’air, demander ce qui se passe.
C’est Hyacinthe Kafando et Maïga qui l’ont croisé. Je ne sais pas qui a tiré en premier sur le président Sankara. Il est tombé sur les genoux avant de basculer sur le côté gauche », a-t-il développé.

Il a reconnu les faits de « complicité d’attentat à la sûreté de l’Etat », mais nié la préméditation, assurant ne pas avoir participé à une rencontre préparatoire à ces évènements. « Je ne savais pas qu’on partait faire un coup d’Etat, à plus forte raison ôter la vie de quelqu’un », a-t-il dit.

« Ils ont abattu froidement le président Sankara qui est sorti les mains en l’air et sans armes », a de son côté déclaré Me Ferdinand Nzapa, l’avocat de la famille Sankara, estimant qu’il s’agissait du « seul accusé à être très coopératif ».
Avant le début de l’interrogatoire, le tribunal a écouté des fichiers audio et vidéo datant de 1987 dans lesquels Blaise Compaoré justifie les événements de ce 15 octobre, résultant selon lui de « divergences fondamentales nées depuis un an sur des questions opérationnelles du processus révolutionnaire ».

Dans l’un des fichiers, Compaoré, qui avait participé en 1983 au coup d’Etat ayant porté au pouvoir Thomas Sankara dont il était un ami intime, le présente comme un « traître à la révolution qui menait un pouvoir autocratique » et « personnel ». « Les autres camarades avaient décidé de le démettre » ou de le forcer à « démissionner », ajoute-t-il, justifiant la « nécessité d’une rectification ».

Mousbila Sankara, Ambassadeur au moment de l’assassinat de Thomas Sankara et de ses compagnons, dit avoir été torturé et emprisonné pendant 4 ans, pour avoir osé dire non à ce qu’il se passait.

« Après l’assassinat de Thomas Sankara et de ses compagnons en 1987, nonobstant la perte de notre révolution, j’ai personnellement été arrêté, torturé et emprisonné pendant 4 ans pour avoir dit non.

J’ai été torturé par Gilbert Diendéré au conseil de l’entente. J’ai aussi été torturé à la gendarmerie sous la direction du capitaine Jean-Pierre Palm pendant deux ans. » , déclare-t-il.

Il poursuit : « Ils sont tous cités dans ce procès. Je ne sais pas à quel titre chacun a été mêlé, mais en ce qui me concerne, c’est eux qui étaient responsables des casernes dans lesquelles j’ai été torturé ».

Bras droit de Sankara, Blaise Compaoré a toujours nié avoir commandité l’assassinat.
Douze des 14 accusés sont présents, dont le général Gilbert Diendéré, 61 ans, un des principaux chefs de l’armée lors du putsch de 1987.

Mais Blaise Compaoré, qui vit en Côte d’Ivoire, est absent, tout comme l’ancien adjudant-chef Hyacinthe Kafando, en fuite. Blaise Compaoré, chassé du pouvoir en 2014 par la rue, est accusé de « complicité d’assassinats », « recel de cadavres » et « attentat à la sûreté de l’Etat ».

Mardi, le tribunal a accédé à une requête des avocats de la défense, demandant la remise en liberté des accusés qui avaient été écroués à deux jours de l’ouverture du procès.
Onze d’entre eux vont bénéficier de cette liberté provisoire. Seul le général Diendéré est maintenu en détention car il purge déjà une peine de 20 ans de prison pour une tentative de coup d’Etat en 2015.

 

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