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LE CORONAVIRUS A-T-IL ÉTÉ CRÉÉ EN LABORATOIRE PAR LES FRANÇAIS ET LES CHINOIS ?

COVID-19 – Le coronavirus serait “made in Françe” (sic). Voilà ce que clame une vidéo publiée sur Facebook  mardi 17 mars, vue 3,3 millions de fois et partagée plus de 130.000 fois en 24 heures seulement, avant d’être finalement signalée par Facebook comme contenant des fake news. Car cette logorrhée d’une vingtaine de minutes compile nombre de clichés et raccourcis complotistes diffusés sur les réseaux sociaux depuis le début de l’épidémie.

Mis en ligne par un compte du nom de “Cat Antonio” -qui relaie depuis plusieurs mois de nombreux contenus favorables au mouvement des gilets jaunes-, la séquence met notamment en cause l’institut Pasteur, fondation à but non-lucratif au service de la recherche médicale en France. Selon le vidéaste, qui évoque un brevet déposé dès 2004 par l’institut, c’est cet organisme qui aurait contribué à la fabrication du virus qui a déjà fait plus de 8.000 morts dans le monde.

Le brevet d’un autre coronavirus

En l’occurrence, et comme le relèvent nos confrères de l’Agence France Presse, le brevet incriminé dans la vidéo (EP 1 694 829 B1) est réel et date bien de 2004, mais il porte sur une souche du SRAS-CoV (syndrome respiratoire aigu sévère), le virus à l’origine d’une autre épidémie mortelle, survenue elle en 2003. Selon les chiffres de l’Organisation mondiale de la Santé, cette épidémie avait fait près de 800 victimes.

Il s’agit là d’une rumeur qui revient régulièrement sur les réseaux sociaux depuis le début de l’épidémie de coronavirus. En anglais comme en français, plusieurs publications devenues très virales accusaient tour à tour les États-Unis et un institut de recherche britannique d’avoir conçu le virus en laboratoire.

Une ineptie, puisque comme l’explique à l’AFP Vincent Enouf, directeur adjoint du Centre national de référence (CNR) des virus des infections respiratoires de l’Institut Pasteur à Paris, le fait de déposer un brevet sur un virus ne signifie pas qu’on l’a créé. C’est simplement une manière de protéger le fait de l’avoir découvert, les techniques utilisées pour le comprendre et l’analyser, les méthodes de recherche. Et donc de plancher sur un vaccin.

AFP Factuel 

✔@AfpFactuel

En réponse à @AfpFactuel @institutpasteur

« L’intérêt de breveter, c’est de protéger cette séquence pour pouvoir mettre au point des tests et des vaccins », ajoute Olivier Schwartz. 7/8

Tout au long de la vidéo de “Cat Antonio”, plusieurs éléments font d’ailleurs penser à une réthorique complotiste. Pendant vingt minutes, il se défend d’être un illuminati (une prétendue société secrète au cœur de la pensée d’adhérents de la théorie du complot), un complotiste, un franc-maçon, de n’avancer que des éléments vérifiables, de chercher à découvrir à qui peut profiter une telle épidémie.

Sauf que comme l’exemple du brevet l’a prouvé, les arguments avancés sont en réalité le fruit d’une lecture erronée de documents qui, eux, existent réellement. Des erreurs d’analyse volontaires (ou juste des erreurs d’analyse) qui font dire à des documents autre chose que ce qu’ils signifient en réalité, comme le note Conspiracy Watch, un organisme spécialisé dans la lutte contre le conspirationnisme et les fake news.

Un exemple de cela réside dans l’exemple du “laboratoire P4”, sur lequel “Cat Antonio” s’épanche longuement, et qui lui sert à expliquer que le virus aurait été fabriqué avant de réussir à s’échapper du laboratoire. En l’occurrence, comme l’explique notamment le spécialiste de la lutte contre les théories du complot “Debunker des étoiles”, les laboratoires P4 existent et travaillent sur les virus les plus dangereux de la planète. Ils étudient ainsi des agents pathogènes au taux de mortalité très élevé en cas d’infection.

Or ce qui fait que “Cat Antonio” s’emballe, c’est qu’il existe un laboratoire de ce type à Wuhan, l’épicentre de l’épidémie de coronavirus en cours. Un laboratoire fruit d’un partenariat franco-chinois qui plus est. Mais là encore, l’auteur de la vidéo complotiste tord les faits: les laboratoires P4 ne traitent absolument pas de virus comme le covid-19, mais d’agents bien plus létaux. Et il n’y a donc aucune chance que le labo de Wuhan ait cherché à créer une arme chimique qui se serait malencontreusement échappée, comme dans un mauvais blockbuster.

Une vidéo complotiste virale sur le coronavirus circule en ce moment sur Facebook et Youtube, prétendant que les labos français auraient développé le coronavirus depuis 2004, puis diffusé à des fins…

En outre, comme l’a expliqué l’épidémiologiste américain Trevor Bedford, le génome du virus actuel (il existe différentes souches du coronavirus dans la nature) est parfaitement compatible avec des mutations naturelles, mais pas avec une conception en laboratoire. En ce sens, il ne peut pas avoir été créé, mais a bel et bien été transmis par un porteur animal à l’homme.

De fait, la souche du virus qui se propage actuellement est extrêmement proche du virus dont est naturellement porteuse la chauve-souris.

À ce propos, le vidéaste affirme d’ailleurs que des tests auraient été effectués sur des chauve-souris par le laboratoire P4 de Wuhan, ce qui est faux. Il s’agit d’une rumeur infondée et colportée depuis le début de l’épidémie sur les réseaux sociaux.

Chercheurs du CNRS, de l’Inserm, institut Pasteur… Durant sa vidéo, “Cat Antonio” accuse donc, au moyen de différents arguments fallacieux, des scientifiques français d’avoir conçu dans un laboratoire chinois ce virus mortel. Avec, à en croire l’auteur de la vidéo, un but final: celui d’engranger des profits.

Alors même que les laboratoires du monde entier sont à pied d’œuvre pour tenter de trouver un remède à la pandémie, et que l’économie mondiale traverse une crise terrible, la vidéo assure sans trembler qu’un vaccin existe en réalité et que les laboratoires n’attendent plus que de le vendre.

Des accusations lunaires, qui ont même poussé l’institut Pasteur à démentir formellement, qui s’en prennent pêle-mêle à Agnès Buzyn et à son mari Yves Lévy, qui fut PDG de l’Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale), ou encore l’ancien ministre de l’Intérieur Bernard Cazeneuve, faisant fi de toute réalité économique, et oubliant que la recherche coûtera infiniment plus qu’elle ne rapportera dans la lutte contre le coronavirus.

Source : HuffPost

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