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LE GANG DU CLAN MAFIEUX QUI FAIT MAIN BASSE SUR LE CAMEROUN

Par Michel Biem Tong, web-journaliste, exilé

C’est le plus lourd héritage que nous laisse Paul Biya en ce moment où tout porte à croire qu’a sonné le crépuscule de son long règne. Le départ de ce dernier du pouvoir ne changera rien car il aura laissé derrière lui un clan qui se sera solidement enraciné pendant près d’une quarantaine d’années. Un clan de profito-jouisseurs qui est constitué : de la famille présidentielle, de la belle-famille présidentielle, de la bourgeoisie militaire et des lobbies d’affaires français.
Une poignée de personnes qui s’est accaparée de la richesse du pays, laissant la masse croupir dans une misère indescriptible, réprimant toute contestation de ses privilèges mal acquis et maintenant le peuple camerounais dans la peur et l’obscurantisme. C’est ce clan mafieux qui utilise l’Opération Epervier pour réduire au silence tous ceux qui empiètent sur leurs intérêts. Cet article a pour but d’exposer ces hommes et femmes afin que les Camerounais sachent d’où proviennent leurs malheurs.

LA FAMILLE BIYA

Dans cette catégorie, on retrouve la Première Dame, CHANTAL BIYA. Cette dernière utilise le prétexte des œuvres caritatives (Synergies Africaines, Fondation Chantal Biya, etc.) pour s’en mettre plein les poches au détriment du peuple camerounais. Lors de son procès en 2007, l’ancien Directeur général du Fonds d’Equipement intercommunal (Feicom), Emmanuel Egard Ondo Ndong (séquestré à la gendarmerie nationale dans le cadre de l’Opération d’épuration politique Epervier) a déclaré avoir ordonné le décaissement de plusieurs dizaines de millions au profit de Chantal Biya.

D’après le site internet Coups Francs du journaliste camerounais en exil en France J.Remy Ngono, la douane belge a saisi récemment des bijoux destinés à Dame Biya d’un montant de 200 000 euros, soit près de 1, 3 milliards de F CFA. Juste pour des bijoux ! Rappelons que Chantal Biya n’a pas de passé de femmes d’affaires. C’est pourtant elle qui, d’après un documentaire d’une télévision suisse, se tape des voyages Yaoundé-Genève en jet privé juste pour refaire ses grosses coiffures à près de 500 millions de FCFA. De sources dignes de foi lui prêtent un magasin de vente d’articles d’ameublement appelé Chic Design au quartier Bastos à Yaoundé, non loin de l’ambassade des Etats-Unis.

Dans cette famille royale, FRANCK BIYA joue également un rôle non-négligeable dans le fonctionnement de l’Etat. Homme d’affaires véreux opérant dans le secteur du bois, ses sociétés ont plusieurs fois été dénoncées par l’association française Survie de Mme Odile Tobner Mongo Beti pour la destruction de plusieurs hectares de forêts au Cameroun. Conseiller officieux de son père, intermédiaire entre des hommes d’affaires étrangers et le gouvernement, il est de plus en plus présenté comme son successeur à la tête de l’Etat. Le « fils de son père » n’a pas moins bénéficié de passe-droits sur le dos du contribuable camerounais.
L’affaire des Obligation de Trésor à Coupon Zéro reste vivace dans la mémoire des Camerounais. Grace à cette opération digne d’une maffia sicilienne, Franck Biya s’en est tiré avec des obligations d’un montant de plus de 100 milliards de FCFA avant échéance et grâce à des complicités au sommet de l’Etat. Franck Biya a engrangé d’énormes bénéfices de ces affaires au point de se taper une villa cossue à Monaco en France.

Aux deux premiers cités, on ajouterait LES FRERES HERTZ, les fils jumeaux de Chantal Biya. L’un d’eux a gagné plusieurs marchés dans le cadre de l’organisation de la CAN 2019 qui a été retirée au Cameroun par la CAF à cause des retards dans l’exécution des travaux. Les deux sont d’ailleurs impliqués dans pas mal de marchés fictifs à travers la République. L’un d’eux est en service à la Société nationale des hydrocarbures.

Des personnes telles que le député BONAVENTURE MVONDO ASSAM alias BONIVAN, actif dans l’exploitation du cobalt grâce à son entreprise COFA, et Martin Bile Bidjang, chargé de mission à la présidence de la République, ont également bénéficié d’un certain nombre de privilèges parce que neveux de Paul Biya. Martin Bile Bidjang, en plus d’avoir provoqué la faillite de l’entreprise Trust Travel à qui il doit 60 millions de FCFA pour commande de billets d’avion restés impayés, est responsable de Corps Sanitaires Internationaux, une association accusée d’avoir en 2011, spolié plus de 2 milliards de F CFA à des hommes d’affaires camerounais dans le cadre d’une affaire qui puait de l’escroquerie.

La famille présidentielle au Cameroun, au cours de ces 37 dernières années, a amassé une fortune colossale sur le dos du pauvre contribuable camerounais. Au début des années 1992, l’ancien DG de la défunte Société camerounaise de banque, Messi Messi (exilé au Canada) a expliqué à Jeune Afrique Economie qu’au milieu des années 1980, grâce à deux prête-noms, la famille Biya a puisé d’énormes sommes d’argent de ladite société qui, au bord de la faillite, a été racheté par le Crédit Lyonnais.

Avant qu’elle ne soit expulsée des Etats-Unis pour excès de banga (chanvre), Brenda Biya, 22 ans, fille du président Biya, occupait une résidence à Los Angeles que son père payait à 13 millions de FCFA le mois ! D’ailleurs, ce dernier, d’après un classement du magazine anglais Forbes paru en 2014, ne pèsent-il pas à lui seul 120 milliards de FCFA ?

LA BELLE-FAMILLE BIYA

On ne va pas citer toute la bande. Juste quelques figures emblématiques telles que l’actuel secrétaire général à la présidence, Ferdinand Ngoh Ngoh, l’actuel ministre de la Culture, Pierre Bidoung Mkpwatt (dont l’épouse s’occupe de la gestion des affaires caritatives de Chantal Biya), l’actuel directeur adjoint du Cabinet civil, Osvalde Baboke et Antoine Samba, inspecteur général des services financiers au ministère des Finances. Tous sont des proches de Chantal Biya. Les deux premiers sont impliqués dans le scandale de détournements des milliers de milliards de F CFA dans le cadre de la construction des infrastructures de la CAN 2019 retirée au Cameroun pour être confiée à l’Egypte. Au moment de ce retrait, Bidoung Mkpwatt est ministre des Sports et de l’Education Physique.
Quant au deux derniers, ils sont pasteurs pentecôtistes dans une église à l’architecture futuriste au quartier Mvog Ada appelée « Chapelle de la Gloire ». D’aucuns soupçonnent un circuit de blanchiment d’argent. Mais rien ne nous permet d’accorder du crédit à ces informations. Antoine Samba a défrayé la chronique en avril 2017 à travers son château de nabab construit à la sortie ouest de Yaoundé qui a fait le tour des réseaux sociaux. Les Camerounais se sont demandés à cette époque comment un fonctionnaire pouvait se taper une demeure que même un homme d’affaires ne peut se permettre ? Il était alors directeur général du budget au ministère des Finances.

LA BOURGEOISIE MILITAIRE

Parce qu’il lui doit d’avoir sauvé son pouvoir en avril 1984, Paul Biya a tout donné à l’armée. D’autres vont jusqu’ à dire que le Cameroun est dirigé par un régime militaire avec à sa tête, un civil. Conséquence, cette dernière, Etat dans l’Etat, s’est constitué de privilèges colossaux.

Généraux et colonels et autres militaires de rang inférieur, convaincus de leur immunité, verse dans l’affairisme. Dans tous les secteurs, on les retrouve : société de gardiennage, immobilier, exploitation forestière et minière, hôtellerie, microfinances.

Le corps les plus choyé et équipé de cette armée est le Bataillon d’intervention rapide (BIR), une unité d’élite formée par des instructeurs militaires israéliens, à laquelle une partie du budget de la Société nationale des hydrocarbures (SNH) est consacrée. La Garde Présidentielle est également parmi les « enfants gâtée » du régime Biya.

L’armée est aussi l’un des leviers sur lequel s’appuyerait le pouvoir de Yaoundé en cas de soulèvement populaire. Ne voulant pas voir leurs privilèges leur filer entre les doigts, les généraux et autres colonels donneraient des ordres aux soldats du rang de tirer sur la foule pour contenir toute insurrection. Dans la révolte armée en zone anglophone, le général René Claude Meka, chef d’Etat-major (CEMA) des armées joue un rôle de premier plan. Sa responsabilité en tant que CEMA est engagée dans les massacres des civils en zone anglophone par des soldats.

Le pouvoir de Yaoundé se sert aussi d’un voyou au nom de colonel Emile Bamkoui, commandant de la Division de la Sécurité Militaire (Sémil) pour infiltrer, filer et tenter de tuer les contestataires et cyber-activistes de la diaspora. Sur place au pays, sa coquille vide appelée Sémil est mise à contribution pour torturer et intimider les journalistes et artistes-musiciens qui critiquent le régime. Votre humble serviteur est l’une des victimes du patron de la Sémil. Un sanguinaire qui m’a jeté en cellule puis en prison sur la base d’un soi-disant procès-verbal d’enquête de sécurité, un torchon contenant mes propos reproduits en un français de Moussa.

Le pouvoir de Yaoundé utilise aussi le Tribunal militaire pour semer la terreur parmi les opposants et activistes anti-Biya. Ce tribunal politique est chargé d’orchestrer des procès kafkaïens contre les opposants, de les séquestrer en prison, puis de les condamner à de lourdes peines d’emprisonnement ferme. Histoire de dissuader d’autres d’emprunter le chemin de la protestation. Vous avez dit régime militaire !

LES LOBBIES D’AFFAIRES FRANCAIS

Le Cameroun (du moins le Cameroun francophone) est certes une ex-colonie française de fait, mais il demeure une propriété de la France depuis les accords secrets signés entre le Général de Guaulle, président de la France et Ahmadou Ahidjo, Premier Ministre de la République du Cameroun le 26 décembre 1959. Ces accords confiaient la priorité de l’exploitation du sous-sol camerounais à la France. Cette dernière est également présente au Cameroun dans tous les secteurs d’activité économique. Le groupe Bolloré contrôle le secteur portuaire, le transport ferroviaire. La famille Castel, Vilgrain et la Compagnie fruitière de Marseille est présente dans l’agro-alimentaire. Total et Perenco exploitent du pétrole. Hachette gère l’édition des oeuvres littéraires et manuels scolaires. La téléphonie mobile est l’affaire d’Orange. Le groupe Lafarge est présent dans le marché du ciment. La Société Générale, le Crédit Lyonnais contrôlent les banques. Vinci et Bouygues le BTP. A la présidence de la République, l’un des conseillers officieux de Paul Biya est un Français. Il s’appelle Yvon Omnes, ancien ambassadeur de France au Cameroun. C’est dire si la France est l’un des piliers du régime Biya. Voilà pourquoi elles cautionnent les massacres des civils en zone anglophone car ses intérêts dans la zone sont menacés, notamment dans les domaines de l’agro-alimentaire et le pétrole.

Comme nous venons de le voir plus haut, pour un Cameroun nouveau, il va falloir que les forces du changement (opposition, syndicats, société civile) concentrent leurs énergies sur ces 4 boulons. Si ces derniers sautent, notre pays sera résolument engagé vers le chemin de la prospérité et de l’émergence. Autrement, même après Biya, le Cameroun sera toujours le vaste champ de ruine qu’il est en ce moment.

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