Dans le viseur de plusieurs élus de la République française – notamment de droite – ces derniers jours, le gouvernement a engagé la procédure de dissolution de la Ligue de défense noire africaine va être prochainement dissoute. « J’ai décidé de lancer la procédure engageant la dissolution » de l’association, a indiqué lundi sur Twitter Gérald Darmanin. « Les discours de cette structure raciste appellent à la haine et à la discrimination. Ses actions causent des troubles à l’ordre public, comme ce week-end à Val-de-Reuil », a expliqué le ministre de l’Intérieur.
Plus tôt dans la journée, Éric Ciotti (LR) avait appelé de ses vœux une telle décision, estimant qu’une « nouvelle étape intolérable dans la violence contre la France et la République » avait été franchie par l’organisation. Cette dernière était également dans le viseur du RN. Mais qu’est-ce que la Ligue de défense noire africaine (LDNA) ?
Créée en 2017 et inscrite au répertoire national des associations, l’ONG se présente comme un « mouvement contre la négrophobie, racisme, discrimination, néocolonialisme, prônant le respect de la communauté noire ». Son fondateur, Sylvain Afoua, plus connu sous le nom d’Egountchi Behanzin, se revendique, lui, « activiste politique, anti-négrophobie, panafricain et révolutionnaire ».
Cette structure s’est fait connaître par ses positions tranchées, parfois sulfureuses, et ses actions coup de poing. Après plusieurs petits coups médiatiques, en 2019, une cinquantaine de militants de la LDNA empêchent la tenue d’une représentation d’une pièce de théâtre à la Sorbonne dans laquelle les comédiens portent des masques noirs. L’association y voit du racialisme et de la « négrophobie raciale ». « On ne peut plus nous représenter de cette manière déshumanisante. Pour jouer des noirs sur scène, il faut prendre des comédiens noirs. Le théâtre doit être représentatif de la société », assène alors Egountchi Behanzin.
Un mois plus tard, le groupuscule fait de nouveau parler de lui lors d’une mobilisation à la Grande Halle de la Villette (Paris) pour tenter de faire annuler l’exposition Toutânkhamon : le trésor du pharaon. Il soutient que certains souverains de l’Égypte antique étaient de couleur noire.« C’est la falsification de l’histoire africaine, le blanchiment de l’histoire, et dans cette dynamique-là, il y a le blanchiment de la civilisation égyptienne », s’emporte le militant Émilien Missuma, cité par Radio Canada. Des accusations que les historiens réfutent.
Par la suite, le mouvement prend encore de l’ampleur avec les mobilisations anti-racisme succédant au meurtre de George Floyd aux États-Unis. « La France, c’est-à-dire l’État français, est un État totalitaire, terroriste, esclavagiste, colonialiste ! L’État français exploite son propre peuple, alors vous imaginez ce qu’ils font en Afrique », déclare en juin 2020 le chef de file de la Ligue de défense noire africaine au cours d’un sit-in devant l’ambassade américaine.
Mais c’est surtout au début de l’année 2021, en janvier, que la LDNA va choquer l’opinion. Après le décès de deux soldats français au Mali, la ligue affirme « ne pas regretter la mort de ces militaires qui n’auraient pas dû protéger au Mali les intérêts économiques de la bourgeoisie criminelle française menée par Bolloré ».
La semaine dernière, l’association s’est de nouveau illustrée lors d’une série d’incidents à Val-de-Reuil, en Normandie. Une cinquantaine de personnes ont fait irruption dans la marie de la commune, dimanche. « Hier, de manière complètement folle, un groupe qui cherche à faire le buzz a envahi la mairie de manière scandaleuse, a causé le malaise de deux enfants, a terrorisé trois mariages successifs et m’a enfariné, ce qui n’est pas très grave (…), mais ce qui est scandaleux, c’est qu’il s’agit d’une maison de la République, c’est le symbole », a réagi le maire PS de Val-de-Reuil, Marc-Antoine Jamet.
Sur Facebook, près de 300 000 personnes sont abonnées à leur page qui reprend en direct des agressions jugées négrophobes. Ils sont plus de 50 000 sur Instagram. Sur Twitter, leur compte a été suspendu. Ils communiquent aussi via leur site internet amateur – fond noir et logo en or – où l’on peut lire qu’il y a « une agression négrophobe toutes les 50 secondes en France. » La voix de l’organisation devient de plus en plus audible.