LE PLUS GRAND ET RICHE PANAFRICANISTE DE TOUTE L’HISTOIRE
Dans les mondes francophones, on ne connait pas grand chose de Marcus Garvey au delà de l’image mythique que l’on a dressé du personnage. On relève surtout de lui ses discours et ses actes les plus provocateurs et par là on contribue à dévaluer la portée historique de ses actes
Alors que dans les faits, Marcus Garvey reste un personnage essentiel et incontournable de l’histoire des peuples négro-africains du continent et des diasporas.
Essentiellement parce qu’il a créé en l’espace de seulement quelques années une contre-société noire aux États-Unis qui s’était appuyée sur l’ébauche d’un contre-état noir.
Dès son plus jeune âge Marcus Garvey avait été passionné par la lecture au point de travailler dans une imprimerie.
Il découvrit alors la puissance du journalisme qui permettait déjà à cette époque à un auteur de s’adresser à des millions de gens
Homme de terrain, pendant quelques années, il avait voyagé en Amérique centrale et en Amérique latine et y avait découvert avec horreur les conditions de vie des Noirs qui partout atteignaient le même niveau de déshumanisation.
Il se forgea alors à l’idée que jamais les Noirs ne pourraient faire respecter leurs droits fondamentaux, humains et civiques en Occident, ni y vivre libres, encore moins y exprimer leur potentiel.
C’est cette conviction inébranlable qui l’amena à fonder l’UNIA en 1916 à Harlem.
L’organisation lui servit par la suite d’outil central pour réaliser ses projets.
Il fonda un journal le Negro World qui s’adressa d’abord à tous les Noirs de par le monde.
Garvey y aborda deux thèmes centraux.
Il se prononça pour une indépendance immédiate et sans condition de l’Afrique noire qu’il exprima par le slogan : l’Afrique aux Africains.
En pleine ère du colonialisme triomphant son journal fut interdit de diffusion dans les colonies africaines.
Le Negro World influença néanmoins un parti politique naissant en Afrique du sud : l’ANC, dont les générations successives de membres historiques ont tous eu une parfaite connaissance des idées de Garvey.
Ensuite Garvey prôna une indépendance économique et financière totale des communautés noires vivant en diaspora vis à vis des institutions blanches qui au mieux ne savaient que distribuer l’aumône aux Noirs.
À ce titre il avait créé la Negro Factory Corporation une succursale économique de l’UNIA qui regroupa en son sein des commerces des usines des sociétés de distribution noirs afin que ces entreprises puissent exister en toute autonomie dans le monde économique des Blancs.
Marcus Garvey pensait aussi que les Noirs devaient pouvoir défendre leur vie et leurs biens par eux-mêmes.D’où le fait qu’il créa le 15 ème et le 18ème régiment Noirs, composés de soldats noirs qui avaient combattu en Europe au cours de la première guerre mondiale.
Pour montrer sa puissance militaire, des détachements de cet embryon de corps armé avait pris l’habitude de parader dans Harlem les week-ends. Ils étaient suivis d’unités de femmes et d’hommes noirs eux aussi en uniforme.
En ces occasions, Garvey qui était lui aussi en tenue d’apparat défiait ouvertement le KU Klux Klan lui proposant de « monter à Harlem pour casser du Noir « .
Les Noirs arboraient fièrement dans ces manifestations le drapeau de l’UNIA, aussi celui de la future Afrique libérée du colonialisme, aux fameuses couleurs, rouge noir vert .
Marcus Garvey pensait qu’à terme les Noirs devaient pouvoir retourner sur le continent mère de l’Afrique.
Et c’est à ce titre qu’il fonda une compagnie maritime : la Black Star Line et qu’il acheta un premier bateau en vue du grand rapatriement des Noirs
Marcus Garvey réussit le tour de force de regrouper autour de l’UNIA plusieurs millions d’adeptes Noirs de part le monde.
Africain de Jamaïque né au lendemain de la fin de l’ère esclavagiste aux Amériques et au début de l’ère coloniale en Afrique, Marcus Garvey a bien sûr été violemment réprimé par le pouvoir blanc et par de nombreux Noirs en voie d’intégration dans les mondes blancs.
Mais son héritage est aujourd’hui bien plus vivace qu’on ne l’imagine, au moins dans les espaces anglophones à travers des figures comme Malcolm X, Kwame Nkrumah, ou Miles Davis et à travers des mouvements culturels comme Rastafari
Et ce, même si aujourd’hui les médias de toutes origines prennent un soin tout particulier à ce que l’histoire et l’ héritage de cet homme ne soient jamais révélés.