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LE PREMIER NOIR CHAMPION DU MONDE ABATTU PAR DES BALLES RACISTES

Battling Siki est un athlète sénégalais qui devint le premier boxeur africain à devenir champion du monde de boxe. De son vrai nom Louis Mbarick Amadou Fall, il fut l’un des boxeurs les plus talentueux du début du XXe siècle. Son surnom reflète bien sa personnalité : c’est un guerrier qui combat sans relâche (« battling » en anglais) et avec beaucoup de bravoure (« siki », déformation de « siggi » une interjection wolof exhortant au courage).

Né à Saint-Louis du Sénégal en 1897, il arrive en France à l’adolescence dans des circonstances qui restent mystérieuses, certains affirmant qu’il a été amené par une danseuse néerlandaise qui s’était amourachée de lui, d’autres estimant qu’il était destiné à être le domestique d’une actrice française. Toujours est-il qu’il se met rapidement pratiquer la boxe et à exceller dans ce sport.

Après avoir remporté de nombreuses victoires, sa prometteuse carrière est interrompue par le déclenchement de la Première Guerre mondiale. Incorporé comme soldat de l’armée française, Battling Siki se distingue durant les combats et finit décoré de la Croix de guerre.

Il reprend la boxe en 1919 et ses performances remarquées lui permettent d’affronter en 1922 l’idole des Français, George Carpentier. Il subit de plein fouet les commentaires racistes de certains boxeurs et de certains journalistes sportifs qui vont jusqu’à le surnommer le « championzée ».

En France où il vit, certains journaux l’appellent le « championzé » par référence au chimpanzé ou de façon beaucoup plus explicite le « gorille des rings » ou encore « l’enfant de la jungle », «l’enfant sauvage ».

Le Journal l’intransigeant titre même « Siki donnerait la moitié de ses victoires pour devenir blanc ». Son propre manager n’est pas en reste puisqu’il déclare dans la presse que « Siki a du singe en lui ».

Dans la transcription de certaines interviews, on lui fait parler un français approximatif, « petit nègre » (comme on dit à cette époque) alors qu’il parle et écrit un français parfait. Battling Siki répond à ces attaques en disant : « beaucoup de journalistes ont écrit que j’avais un style issu de la jungle, que j’étais un chimpanzé à qui on avait appris à porter des gants. Ce genre de commentaires me fait mal. J’ai toujours vécu dans de grandes villes. Je n’ai jamais vu la jungle ».

Son combat contre Georges Carpentier restera dans les annales de l’histoire de la boxe. Peu avant le combat, on ne vendait pas cher la peau de Battling Siki. Paris Match écrit : « Le problème est de savoir si un Blanc vaut deu Noirs – comme pour les notes de musique… ».

Devant les 50 000 spectateurs qui se sont amassés dans le stade Buffalo de Montrouge, Battling Siki, simple challenger, livre un combat héroïque. Mis deux fois au tapis durant les premiers rounds, il ne se laisse pas déstabiliser par les provocations de Carpentier qui lui aurait notamment lancé: « dépêchons-nous donc, il va bientôt pleuvoir » ! Retrouvant son punch, « Battling Siki » met finalement son adversaire K.O par un énergique uppercut du droit.

L’arbitre consulte les autres juges et annoncent que Siki est disqualifié. Georges Carpentier est déclaré vainqueur. C’est alors que se produit un évènement inédit dans l’Histoire de la boxe. Les cinquante mille spectateurs du stade Buffalo se mettent à scander : « Siki vainqueur ! Siki vainqueur ! ». Les juges se réunissent en conciliabule pendant une quinzaine de minutes, puis l’arbitre s’approche de Siki, l’amène au centre du ring et lui lève le bras en signe.

Après avoir perdu son titre de champion du monde, il enchaîne les défaites et se réfugie dans une vie de débauche qui prend tragiquement fin en 1925 : à seulement 28 ans, Siki est abattu par balles dans ce qui s’apparente à un règlement de comptes.

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