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LE SUCCÈS FEMMES NOIRES DANS LA RÉSISTANCE

La révolution haïtienne est connue comme la seule révolution esclavagiste réussie de l’histoire. En 1791, les Africains réduits en esclavage dans la colonie française de Saint-Domingue se levèrent et combattirent les royalistes français, un corps expéditionnaire britannique et enfin les troupes de Napoléon pour obtenir leur liberté. Ce n’est pas l’espace pour raconter les événements dramatiques qui ont conduit à la proclamation de l’indépendance et au changement de nom de l’État en «Haïti» en 1804. Je veux plutôt faire la lumière sur un aspect moins connu de la révolution, à savoir le rôle des femmes en tant que combattantes.

Il existe un certain nombre de récits faisant état de femmes combattant dans les rangs des insurgés. Des femmes armées se trouvaient parmi les bandes de marrons, des esclaves en fuite qui opéraient souvent de manière indépendante. Les femmes ont également aidé à défendre les villes assiégées par les Britanniques. Une Marie-Jeanne Lamartiniére rejoint la défense héroïque d’une redoute près de Crête-à-Pierrot en 1802, où les Français perdent près de 1.500 hommes jusqu’à ce qu’ils parviennent à s’emparer de la position. Lors d’une attaque rebelle contre une autre fortification, des femmes ont été trouvées dans la première vague, portant des fascines pour couvrir les tranchées.

Les femmes étaient également souvent au centre des révoltes locales. Lors de l’insurrection de 1791, une «fille de couleur» appelée princesse Améthyste aurait organisé une compagnie d’Amazones. Cela était probablement lié à un culte religieux, le vaudou jouant un rôle important en tant que moyen de communication et de construction communautaire parmi les Africains réduits en esclavage. En 1802, nous entendons parler d’une femme du nom de Lazare qui était le chef de file d’une insurrection contre l’expédition napoléonienne.

Peut-être la plus célèbre de toutes les guerrières haïtiennes est Sanité Belair. Elle a servi comme lieutenant dans l’armée de Toussaint L’Ouverture et était connue pour sa haine des Blancs. Lorsque le corps expéditionnaire français l’a capturée, elle devait être décapitée mais a exigé d’être fusillée comme un soldat, un souhait qui a été exaucé.

Pourquoi ces femmes se sont-elles battues ? Une explication renvoie à leurs racines africaines. La plupart des esclaves de St Domingue étaient nés en Afrique et avaient apporté leur culture avec eux. Dans plusieurs sociétés africaines, les femmes combattantes n’avaient rien de spécial – l’exemple le plus célèbre étant le Royaume du Dahomey, d’où venaient de nombreux esclaves. Une autre explication est la situation de l’esclavage et la lutte pour la liberté elle-même, qui concerne directement chaque individu. Pour les femmes, l’esclavage était peut-être encore pire à cause de l’exploitation sexuelle, il est donc compréhensible qu’elles se soient battues avec tous les moyens disponibles – y compris les armes – pour se libérer.

Que savons-nous de leur équipement et de leurs tactiques ?
Au début de l’insurrection, les esclaves étaient mal équipés et, à part quelques fusils et pistolets volés, se battaient principalement avec des outils agricoles. Les Espagnols puis les États-Unis leur ont vendu des armes et des munitions, tandis que des dirigeants comme Toussaint L’Ouverture entraînaient leurs troupes à effectuer des manœuvres complexes. De nombreuses sources soulignent la discipline et la bravoure des soldats noirs. Mais même lorsqu’ils avaient acquis des uniformes et s’organisaient selon la réglementation française en demi-brigades, ils évitaient les batailles en plein champ et préféraient la guérilla, tirant à couvert et reculant dès que l’ennemi les engageait en nombre. Cependant, il y a eu quelques batailles sur le terrain, la plus célèbre étant la bataille de Vertières en 1803, où les rebelles ont battu le corps expéditionnaire français.

Les guerrières ont joué un rôle essentiel dans la lutte des Africains asservis pour la liberté et même leurs ennemis ont reconnu leur courage. Le général Leclerc, commandant du corps expéditionnaire français envoyé par Napoléon pour rétablir l’esclavage dans la colonie, écrit avec exaspération : Les hommes meurent avec un fanatisme incroyable ; ils rient de la mort ; c’est la même chose avec les femmes.

-Thomas Brandstetter :
Bibliographie :
Dubois, Laurent: Avengers du Nouveau Monde. L’histoire de la révolution haïtienne , Cambridge, Massachusetts: Harvard University Press 2004.

Girard, Philippe: «Rebelles with a Cause: Women in the Haiti War of Independence, 1802–04», Gender & History 21 (2009), 60–85.

Maurouard, Elvire: Des femmes dans l’émancipation des peuples noirs de Saint-Domingue au Dahomey , Paris: Éditions du Cygne 2013.

-Sanité Belair comme représenté sur un billet de banque haïtien.

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