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MAURICE KAMTO TRAÎNE PAUL BIYA DEVANT LA COUR DE L’UNION AFRICAINE : LES ENJEUX

COMPRENDRE LA DECISION DE LA COMMISSION DE L’UNION AFRICAINE AU SUJET DE LA PLAINTE DU CANDIDAT A L’ELECTION PRESIDENTIELLE DU 07 Octobre 2019, LE PROFESSEUR MAURICE KAMTO.

Suite à différentes sollicitations me demandant d’apporter des clarifications juridiques sur la décision 718/19 de la commission Africaine des droits de l’homme dans sa session du 24 avril au 14 mai 2019, à la suite de la requête introduite par le Professeur Maurice KAMTO visant à contester l’élection de Paul BIYA à la présidentielle du 07 octobre 2018 , je voudrais y répondre sur 03 points.

1- LES FAITS:

A la suite de la proclamation des résultats de l’élection présidentielle du 07 octobre 2019, le conseil constitutionnel
a déclaré le Président Paul BIYA vainqueur.
Le professeur Maurice Kamto a décidé de contester les résultats de cette élection devant l’Union Africaine au vu de sa compétence internationale à vérifier les processus électoraux et démocratiques et le respect des droits de l’homme par les pays membres.

Maurice KAMTO a déposé le 20 janvier 2019, par ses Avocats parmi lesquels des canadiens, français et camerounais , une plainte devant la Commission de l’Union Africaine pour que celle -ci transmette l’affaire pour jugement devant la Cour Africaine des droits de l’homme.
En fait , Maurice KAMTO veut qu’une juridiction de contentieux international se prononce sur l’élection présidentielle qui s’est déroulée au Cameroun le 07 octobre 2018.

C’est une manière astucieuse de faire réexaminer le contentieux électoral en évoquant la violation des droits de l’homme après la décision du Consei constitutionnel camerounais.

Et là , il est juste de reconnaître la subtilité de cette procédure.

2- QUEL EST LE SENS DE LA DECISION DE LA COMMISSION AFRICAINE DES DROITS DE L’HOMME DE L’UNION AFRICAINE?

Il est d’abord important de rappeler que la Commission des droits de de l’Union Africaine est une des instances habiletée à contrôler le respect des droits de l’homme par les pays membres de l’Union Africaine dont le Cameroun.

Mais ce n’est pas une juridiction au sens strict.

A côté d’elle il ya une juridiction contentieuse. C’est la Cour Africaine des droits de l’homme.

In fine ,c’est là-bas que Maurice KAMTO veut que le dossier soit examiné.

Devant cette cour, ce sera une audience avec des débats , des plaidoiries sur l’élection présidentielle du 07 octobre 2018.

Maurice Kamto ne pouvait pas saisir directement cette Cour parce que le Cameroun n’a pas encore ratifié le protocole qui a créé cette Cour. Il fallait donc passer par la Commission Africaine des Droits de l’j’homme et des peuples.

C’est ce que Maurice KAMTO a fait.

Si la commission Africaine trouve les arguments pertinents, elle renverra le dossier devant la Cour Africaine des droits de l’homme.

D’où cette décision sur ce point :

 » Du renvoi à la Cour Africaine des droits de l’homme et des peuples
34- La Commission décide de surseoir à sa décision sur le renvoi à la Cour à ce stade de la procédure …
35- Décide de renvoyer sur sa décision à la Cour à une session ultérieure »

Remarquez bien que je fais la distinction entre la Commission Africaine des droits de l’homme , c’est à dire celle qui a rendu la décision de recevabilité et la Cour Africaine des droits de l’homme que Maurive KAMTO vise pour qu’elle examine le contentieux électoral.

Pour résumer,quand une partie provenant d’un pays qui n’a pas ratifié le protocole de la Cour des droits de l’homme de l’Union Africaine comme le Cameroun, veut que son affaire soit jugée devant la Cour Africaine de droits de l’homme de l’union africaine , elle doit d’abord déposer son dossier devant la Commission des droits de l’homme de l’Union Africaine qui va l’examiner.
Car la Commission a la possibilité de renvoyer le dossier devant la Cour Africaine des droits de l’homme.

Elle joue un peu le rôle de juge instructeur qui mène les enquêtes en examinant si le dosier est bon . S’il le trouve convaincant, il renvoie l’affaire devant le juge qui va se prononcer.

Maurice Kamto vient de franchir une étape très importante de la procédure : la commission de l’Union Africaine a décidé d’ouvrir le dossier d’instruction.

En d’autres termes, elle va maintenant voir s’il y aura des éléments suffisants pour que la Cour des droits de l’homme connaisse de cette affaire.

Elle a demandé à Maurice KAMTO d’apporter les éléments de preuves qui établissent qu’il y a eu violation des droits de l’homme pour qu’elle transmette le dossier à la Cour des droits de l’homme.

En lisant les énoncés de la requête de Maurice KAMTO repris dans la décision, on peut constater qu’il évoque surtout deux cas précis de violations des droits de l’homme visés par la charte africaine des droits de l’homme dont les plus pertinents sont en rapport avec l’élection présidentielle à savoir les articles 13 et 26 de la Charte Africaine des droits de l’homme.

Maurice KAMTO estime que ses droits de l’homme sont violés parce que les résultats et le processus électoral ne lui permettent pas de participer librement à la direction des affaires publiques de son pays (article 13) de la charte et aussi parce que justiciable devant le Conseil constitutionnel, cette juridiction apporté les garanties sur son indépendance. (Article 26)

ARTICLE 13 de la Charte Africaine des droits de l’homme:

 » Tous les citoyens ont le droit de participer librement à la direction des affaires publiques de leur pays, soit directement, soit part l’intermédiaire de représentants librement choisis, ce, conformément aux règles édictées par la loi.
Tous les citoyens ont également le droit d’accéder aux fonctions publiques de leurs pays.
Toute personne a le droit d’user des biens et services publics dans la stricte égalité de tous devant la loi. » »

ARTICLE 26
 » Les Etats parties à la présente Charte ont le devoir de garantir l’indépendance des Tribunaux et de permettre l’établissement et le perfectionnement d’institutions nationales appropriées chargées de la promotion et de la protection des droits et libertés garantis par la présente Charte. »

QUELLE EST DONC LA SUITE DE LA PROCEDURE ?

La Commission demande maintenant à Maurice KAMTO de lui rapporter la preuve de ce que :

1- L’article 13 a été violé çàd que les élections ont été truquées et que les résultats donnés ne lui ont pas permis de diriger le Cameroun.
Il s’agira donc pour lui d’apporter tous les éléments nécessaires qui démontreront par exemple que tous les 32 PV de la Commission nationale de recensement n’ont pas été signées, que les fiches d’émargement n’ont pas été conformes comme il le déclame souvent. Bref , il a l’occasion de démontrer ce qu’il a décrié devant le Conseil constitutionnel.
En réalité, il n’a même pas besoin d’avoir les 25000 PV.

2 – Maurice KAMTO doit ici rapporter la preuve que les juges qu’il a indiqué dans son rapport tombaient sous le coup des incompatibiltés . Ce sera une façon de démontrer l’absence d’indépendance du tribunal. Fait qui constitue une violation des droits de l’homme aux termes de l’article 26.

Il a 02 mois pour le faire.

Le règlement intérieur prévoit qu’après ce delai, ou même avant, après production de ses preuves, la Commission soumettra le dossier à l’Etat du Cameroun qui devra apporter à son tour dans un delai de 02 mois à, la preuve de la victoire de Paul BIYA la régularité de l’élection, l’indépendance d’Elecam et des juges du conseil constitutionnel.

A travers cette procédure,Maurice KAMTO aura réussi en quelque sorte un nouvel examen de ce contentieux électoral.

Après cet échange contradictoire, la Commission rendra sa décision si oui ou non , l’affaire sera renvoyée devant la Cour Africaine des droits de l’homme.

Mais à l’évidence, la décision de la Commission augurera de la décision qui sera rendue par la Cour Africaine des droits de l’homme.

En conclusion , le contentieux électoral du 07 octobre 2019 n’est pas encore terminé.
Si dans l’hypothèse où la Cour des droits de l’homme décide qu’il y a eu violation des droits de l’homme du fait d’une élection truquée, sa décision sera exécutée par le Conseil de Paix de l’Union Africaine et l’Organisation des nations -Unies qui reconnaît les décisions de l’Union Africaine.

Christian NTIMBANE BOMO
Avocat
Activiste de l’Etat de justice au Cameroun.

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