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MOBUTU MORT DES SUITES DES BREUVAGES D’UN GOUROU

Le 17 décembre 1996 , le monde entier et les zaïrois découvrent stupéfaits , un maréchal Mobutu titubant aux pas hésitants , frêle , considérablement affaibli et amaigri , descendant d’avion au bras de son épouse Bobi- Ladawa, dont la sœur jumelle Kossia , partage également en bonne entente , la couche du Léopard.

Le maréchal revient en fait de France , où après une délicate opération de la prostate , effectuée dans une clinique de Lausanne en Suisse , il poursuivait sa convalescence dans sa luxueuse propriété, de Cap – Martin sur la Côte d’Azur.

Presque ignoré par les grands de ce monde , traité en pestiféré et avec mépris , honni et vilipendé dans la capitale zaïroise , Mobutu s’était depuis les travaux de la conférence nationale souveraine en 1991 , éloigné de Kinshasa la rebelle , pour trouver un havre de paix à Gbado- Lide , chez les siens , où il vit cloîtré et reclus dans son palais ; sorte d’esquisse de réplique de Versailles en pleine forêt équatoriale.

Selon son gendre , le belge Pierre Jansens, son ami Jacques Foccart , inquiet face à cet effacement et exil intérieur volontaire , lui aurait intimé au téléphone: “ Léopard, reprends – toi ! Si tu restes un jour de plus dans ta tour d’Ivoire , tu vas définitivement te couper de ton peuple et tu seras condamné. Bientôt, plus personne ne te reconnaîtra dans les rues de ta capitale. Tu es déjà entrain de mourir à petit feu . Si tu ne suis pas mes conseils, tu es un homme mort . “

C’est donc motivé et presque requinqué, par ces exhortations du “ père “ Foccart , que Mobutu se résout enfin de sortir de l’ombre , et à reprendre l’initiative. Il est par ailleurs , vrai que des années auparavant, l’ambassadrice américaine à Kinshasa, Mélissa Wells avait considérablement douché et sapé le moral du maréchal, en osant l’affronter publiquement .

Dotée d’un culot surdimensionné , la diplomate qui ne l’était que de nom , tellement elle était dépourvue de tact , ne se gêna pas le moins du monde , pour aller braver Mobutu jusque dans le Kamanyola, un bâtiment de guerre aux armes et nom du maréchal , qui baignait constamment aux larges du fleuve Congo , et où le Léopard avait ses habitudes , pour lui prodiguer en guise de provocation à peine voilée , une véritable leçon magistrale de démocratie .

S’enquérant en effet , de l’avancée des travaux de la conférence nationale quelle s’avait obstrués par le maréchal, Melissa Wells , qui par un ton autoritaire volontairement destiné à provoquer et sans doute à blesser , semblait vouloir ordonner la marche à suivre à Mobutu .

Elle s’entendit répondre par ce dernier , qui avait le sens de la préséance et du protocole, de voir cela avec Monseigneur Monsegwo, prélat chargé de conduire les dits travaux , avant de conclure que le Zaïre n’était pas une colonie des États – Unis . Piquée au vif dans son orgueil , la diplomate américaine que le maréchal savait très susceptible, teigneuse et belliqueuse de nature , explosa : “ Si vous ne suivez pas le plan prévu par les États – Unis , pour l’avènement de la démocratie au Zaïre, nous vous contraindrons à quitter le pouvoir , que cela vous plaise ou non ! Et nous en avons les moyens ! Car, vous ne disposez plus de vos amis républicains, à la Maison Blanche pour vous couvrir. “

Après les encouragements prodigués, par son ami Jacques Foccart , qui l’adjure presque de faire un bilan de santé , avant de reprendre l’initiative politique, Mobutu qui se plaint de violentes migraines à répétition, qu’il prend tantôt pour des effets collatéraux des maux de dents , et tantôt pour des infections d’oreilles , s’envole de Gbado- Lite en juillet 1996 en direction de la Suisse , consulter ses médecins traitants.

Au centre hospitalier vaudois de Lausanne , où il est reçu séance tenante et toutes affaires cessantes, on lui apprend d’emblée et avec franchise , que le cancer de la prostate diagnostiqué depuis 1990 dont il souffre , s’est à présent généralisé dans tout l’organisme , avec à la clé la présence des métastases osseuses . C’était donc cela , qui expliquait ses nombreuses et constantes migraines , qui avaient le don de mettre constamment le maréchal dans une humeur massacrante !

Après son opération , Mobutu qui est pourtant déclaré persona no grata en territoire helvétique , a pour les besoins de la radiothérapie, ouvertement pris ses quartiers dans le très chic hôtel Beau Rivage , bien connu des amoureux de la chanson “ le téléphone pleure “ de Claude François.

Mis au courant , de la présence du dictateur zaïrois sur le sol suisse , des parlementaires avec à leur tête le tiers-mondiste, Jean – Ziegler , auteur entre autres ouvrages de “ Une Suisse au-dessus de tout soupçon “ ou de “ La Suisse lave plus blanc “ , initient une croisade pour le bouter hors du pays . Les autorités helvétiques quant à elles , font en soufflant le chaud et le froid , le siège de l’hôtel du maréchal pour recouvrer une ancienne créance qui date du tout début des années 1990 . Depuis cette date en effet , le Léopard ne s’était plus jamais acquitté des créances des arriérés de loyers , des missions diplomatiques zaïroises de Genève et Berne . S’ils ne vont pas jusqu’ à prier pour que le maréchal ait la vive sauve , ils vont néanmoins dans leur subconscient, lier son sort à celui de leurs créances . Un petit malin , n’a-t-il pas cru bien faire , de nuancer la célèbre citation d’Amadou Hampaté Bâ, par cette autre variante , selon laquelle “ En Afrique , un dictateur qu meurt , c’est une banque suisse qui ferme “ ?

Mort par négligence

Quand on scrute attentivement , les rapports et archives depuis déclassés, il apparaît en filigrane que selon toute vraisemblance, le maréchal Mobutu aurait perdu la vie par négligence.

En effet , averti dès le début de l’année 1990 d’être atteint d’un cancer de la prostate encore au stade embryonnaire, le Léopard aurait confié son sort aux marabouts , et autres féticheurs que lui recommandait l’oncle Fagbi, qui n’était autre que le très encombrant frère aîné des sœurs jumelles et coépouses du président , à savoir Bobi Ladawa et Kossia .

Très inspirés , les zaïrois dotés d’un sens de l’humour renversant et caustique , le surnommèrent “ le troisième bureau “

Au lieu de suivre un traitement classique , comme le lui recommandait son ami Antoine Konan Kanga, maire de la ville d’Abidjan de 1960 à 1980, lui – même opéré du même mal à l’hôpital Cochin à Paris , Mobutu , encouragé par son beau- frère Fangi , qui exerce visiblement un certain ascendant qui sur lui , va jeter tout son dévolu sur un traitement uniquement à base de plantes , qui lui est administré par des guérisseurs et féticheurs , qui sont en réalité des vrais charlatans.

Malgré l’avancée de la maladie , qui commençait à faire ses effets , le président qui avait toute foi en son beau- frère qui par la force des choses , s’était progressivement imposé comme son gourou , prenait en guise de tout médicament des breuvages à base des plantes et herbes dont nul ne pouvait attester de la provenance . Las la douleur , il finit par faire laisser venir un médecin, qui recommanda son départ pour la Suisse .

Observant en 1995 , que malgré ses recommendations , l’influence nocive de l’oncle Fangbi sur le président, allait croissant , son médecin personnel rédigea en guise de décharge , une lettre dans laquelle il déclinait de façon prémonitoire, toute responsabilité dans l’hypothèse où il advint quelque chose à son illustre patient , pour cause des breuvages qu’on lui faisait ingurgiter en lieu et place de traitement classique .

Jean Pierre Du Pont

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