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PAUL BIYA COMME TOUS LES DICTATEURS AFRICAINS CRÉENT LES GUERRES TRIBALES POUR CONFISQUER LE POUVOIR

INTRODUCTION

Ce n’est donc plus une surprise pour personne de réaliser que l’élite oligarchique du Grand Sud fidèle au régime Biya, se mobilise non pas pour sortir cette partie du pays de la misère, mais plutôt pour confisquer le pouvoir central et imposer à tout le reste du pays un dictat du «centralisme administratif» qui exclut toute idée du «fédéralisme». Paradoxalement, c’est l’élite RDPC au Grand Sud que Charles Ateba Eyene de regretté mémoire qualifiait de «pays organisateur».

Ce serait trop naïf de ma part de faire croire aux Camerounais que « tous les Bulu sont tribalistes», bien au contraire, les faits prouvent essentiellement que ces compatriotes sont eux aussi victimes de la mauvaise gouvernance du régime Biya qui, malgré les 37 ans passés au pouvoir, n’a pas songé à développer le Grand Sud du pays à cause de son incompétence avérée. L’effort donc de l’élite du Grand Sud acquise au régime Biya est de s’accrocher au pouvoir par tous les moyens en se positionnant comme des «victimes des envahisseurs venus du reste du Cameroun» pour voler «leurs terres, leurs richesses, leur pouvoir». C’est dans ce contexte qu’il fait situer les propos sauvages et tribalistes des penseurs comme Fame Ndongo, Dieudonne Essomba, Mathias Eric Owona Nguini et son père avant lui, qui essaient de brandir le Grand Sud comme une chasse gardée de Paul Biya, qui n’a en réalité rien réalisé pour le compte des ressortissants de cette partie du pays!

1. Causes du tribalisme au Cameroun

Dans son ouvrage intitulé : Congo-Brazzaville, le retour des ethnies – La violence identitaire, le Professeur Ngoïe-Ngalla décrit et analyse les rapports d’incompatibilité entre communautés culturelles depuis de longs siècles liés par des rapports d’exclusion, que les administrations coloniales Allemande, Anglaise et Française, par ignorance, avaient regroupées sur un même espace social. Faute de principes adéquats, de régulation de leurs particularismes et de leurs différences au sein de l’État Camerounais, les nouveaux régimes post-independances ont manqué la sagesse de bâtir un vrai État républicain capable d’intégrer la valeurs éthiques qui découragent le tribalisme et toutes les autres formes de discrimination.

Les leaders politiques qui ont eu l’ambition nationale se sont limités plutôt à surfer dangereusement sur logique d’exclusion, qui est le fondement de l’idéologie de l’ethnie afin de gagner le pouvoir et le confisquer avec la bénédiction de la métropole française qui est intéressée par nos matières premières. Une attitude qui en réalité a favorisé l’échec de toute tentative des politiciens à prendre la relève du colonisateur Français après les indépendances, pour greffer sur l’Etat multiethnique qu’ils héritent, les véritables principes de l’ordre républicain. L’ethnie d’après l’analyse du Professeur Ngoïe-Ngalla est un État fragile qui reste en permanence exposé à l’explosion des violences des pluralismes qui s’adaptent mal »! Voici l’une des raisons pour lequel le régime Biya est au bord de l’implosion.

Actuellement, ce qui se passe désormais dans le Grand Sud du pays est un signe palpable que  l’élite RDPC redoute la violence identitaire ou les guerres ethniques nées du tribalisme d’État qu’elle a cultivé pendant longtemps pour se maintenir au pouvoir. Cette violence ethnique a des causes multiples mais dont la principale demeure : l’instrumentalisation des ethnies et tribus par le régime Biya pour confisquer le pouvoir central dans une logique de «diviser pour mieux régner». Il y a donc clairement un risque du «Rwandisation» du Cameroun. C’est important de signaler que les drames inter ethniques comme ceux du Rwanda, des Grands Lacs, du Congo-Brazzaville et de la Côte d’Ivoire, revêtent une dimension de pathologie historique et sociale qui interpelle et révolte la conscience universelle. Les conflits intra et inter communautaires ont pour seule cause le tribalisme qui lui-même pourrait s’expliquer par :

(1) la manipulation de la jeunesse par les leaders politiques
(2) le manque d’éducation et l’ignorance de la quasi totalité des populations
(3) l’extrême pauvreté
(4) la mauvaise gouvernance et l’échec des politiques qui, devant l’impuissance politique, veulent trouver des réponses dans leur ethnie, leur tribu qu’ils essaient d’embrigader comme une espèce de «bouclier humain» face à la colère des autres ethnies qui menacent de se révolter.
(5) le sentiment de supériorité d’une ethnie (l’ethnie au pouvoir pour le cas du Cameroun) sur toutes les autres ethnies du reste du pays.
(6) le respect des droits humains (ce qui a valu à l’État du Cameroun une suspension des accords AGOA par les États Unis)

(7) l’intolérance du pluralisme politique, le cas des villes comme Sangmelima, Ebolowa, Kyossi, Ambam, Zoetele et bien d’autres villes du Grand Sud où les membres du gouvernement imposent aux autres leaders de l’opposition l’hégémonie du RDPC qui reçoit automatiquement 100% à toutes les élections malgré l’absence d’infrastructures adéquates dans toute cette partie du pays. L’élite RDPC du Grand Sud s’est malheureusement fait prendre au piège, car, leurs discours tribalistes pour maintenir Biya au pouvoir sans jamais songer à développer cette partie du pays, a fini par révolter les jeunes du Sud qui s’acharnent désormais plutôt dans le harcèlement des commerçants Bamum, Bamileke et Haoussa résidant dans cette partie du pays!

(8) la peur de la différence
(9) la soif du Pouvoir avec des désirs de conquête et de conservation du Pouvoir
(10) le manque de démocratie à la base
(11) les sentiments d’injustices…

La guerre dans le NOSO est née de la volonté du régime Biya à imposer à tous les autres Camerounais ce «Cameroun un et indivisibles» qui ne profite qu’à l’élite proche de la famille présidentielle. Ce qui est un paradoxe lorsque l’on observe que l’élite du Sud déclare carrément la guerre aux autres formations politiques comme le SDF, l’UDC et le MRC qui ambitionnent de gagner des suffrages dans cette partie du pays pour effectivement prouver que le Cameroun est un et indivisible.

Le Dialogue National Inclusif est une occasion manquée. Car, face à tous ces problèmes énumérés avec en tête d’affiche le tribalisme exacerbé, l’État aurait pu regagner la main en adoptant courageusement «le fédéralisme» pour décrisper les dangereuses tensions sociales qui menacent la stabilité du pays.

2. Le tribalisme comme arme du politique et des politiques au Cameroun

Devant, ce qu’il convient d’appeler « l’impuissance des politiques » au Cameroun, le tribalisme est érigé comme une arme au service du régime Biya, incapable d’asseoir les principes démocratiques dans son pays. Il est devenu aux yeux du monde un piètre dictateur capable de sacrifier le peuple Camerounais pour sauver son pouvoir et ses propres intérêts égoïstes dans une guerre civile sans précédent.

A l’approche des échéances électorales, le régime Biya se réconcilie souvent avec sa base ethnique constituée essentiellement d’hommes, de femmes appartenant à son clan. D’où les expressions souvent répandues du genre : « c’est notre pouvoir » « c’est nous qui commandons » « et vous vous devez attendre votre tour » pour maintenir dans ses rangs des déçus du système issus que l’on embrigade cyniquement comme un bétail électoral qui ne réfléchit pas du tout. Ceux qui refusent de serrer les rangs sont vite brandis comme des traîtres que l’on doit éliminer très rapidement.

Au Cameroun ces derniers temps, face à la contestation du verdict des urnes des dernières élections présidentielles de 2018, Paul Biya se réfugie désormais dans la tribu et l’ethnie pour confisquer le pouvoir en taxant «les Bamileke» «d’agents de destabilisation du pays» qui rêvent de mettre le pays à feu et à sang. La création des milices armées comme le BIR par Paul Biya obéit bien à cette logique. Et lorsqu’il sollicite les suffrages de son peuple, il corrompt les membres de l’ethnie dont il est originaire. Il s’entoure alors de courtisans choisis non pas pour leur compétence mais d’abord pour leur appartenance ethnique. C’est le cas de Fame Ndongo et tous ces zélés proches du pouvoir qui étalent leur incompétence au fil du temps, enfonçant davantage le Cameroun dans la misère et la précarité sans précédent.

C’est ce qui justifie la haine tribale dans le discours politique des ressortissants de l’élite RDPC du Grand Sud lors des émeutes de Sangmelima contre les Bamum, les Bamileke et les Haoussa. Ils n’hésitent plus à appeler à une haine tribale et à une dévalorisation des membres de ces ethnies sus-citées. D’où le fait que le tribalisme apparaisse aussi comme une négation d’Autrui. Ce n’est donc plus choquant de les voir insulter les victimes Bamileke durant l’éboulement de Bafoussam.

3. Le tribalisme comme négation d’Autrui

Le tribalisme au Cameroun commence souvent dans les familles. On entend souvent les parents intervenir dans le choix des futurs conjoints de leurs progénitures. Les stéréotypes sur une ethnie par rapport à une autre, les considérations dévalorisantes d’une tribu vis-à-vis d’une autre ont pour conséquence le tribalisme qui apparaît comme la Négation d’Autrui partout sur le triangle national.
« Les Tutsis sont des cafards » disaient souvent les Hutus avant le génocide de 1994. Au Congo-Brazzaville, avec la guerre de 1993-1994, des expressions dévalorisantes du genre : « Nibolek » pour désigner les populations des départements du Niari, de la Bouenza et de la Lekoumou, ont fait naître la haine tribale. Les populations du département du Pool (Sud de Brazzaville) se sont fait appeler les « Tcheck ». Entre ces considérations dévalorisantes, deux milices armées se sont affrontées à savoir celle de Pascal Lissouba, dénommé les « Zoulous », contre celle de Bernard Kolélas dénommée les « Ninjas ». Une guerre ethnique que d’aucuns ont nommé la guerre des « Bèmbes et des Laari ».

Voilà pourquoi nous condamnons fermement la polarisation du discours politique qui tend désormais à taxer les Camerounais entre: (1) Tontinards et (2) Sardinards. C’est un glissement sémantique dangereux qui peut déboucher dans une guerre ouverte entre les deux groupes.

4. COMMENT AFFRANCHIR LE DISCOURS POLITIQUE DE LA HAINE TRIBALE?

Au terme de cette réflexion sur le tribalisme, nous pouvons dire que ce fléau apparaît comme une violation des droits de l’homme, en ce qu’il déshumanise et nie toute la dignité inhérente à Autrui. Il devient donc urgent de CRIMINALISER LE DISCOURS TRIBALISTE au Cameroun. On doit absolument rédiger une législation qui condamne tous les propos du genre: “les Camerounais de telle ethnie sont les: PORCS, LES SERPENTS À DEUX TÊTES, LES TRAÎTRES DU PAYS, LES VOLEURS, LES GENOCIDAIRES» etc.

C’est important de rappeler à chaque compatriote Camerounais qu’une « ethnie », une « tribu » est d’abord une entité culturelle et sociale qui permet l’identification d’un peuple. Cette notion est certes fragile, manipulable au gré  des politiciens, mais les peuples qui forment la nation Camerounaise doivent rester vigilants pour que le « Cameroun pour nous tous et par nous tous » que recommande vivement le Dr. Adamou Ndam Njoya à l’UDC se traduise un jour en réalité dans nos projets politiques. C’est ce sentiment de partager le Cameroun comme votre espace de vie commune en harmonie et dans la paix qui doit l’emporter sur la haine tribale que propage ces aventuriers politiques qui n’ont aucune assise politique.

Dans un pays où les liens de parenté sont sacrés, cet effort passera par la citoyenneté et le respect des droits de l’homme qui sont aussi et surtout des droits d’Autrui. C’est une question essentielle dans l’idéologie politique de l’Union Démocratique du Cameroun. Car la problématique du «vivre ensemble» au Cameroun nous plonge au cœur de la question de l’autre différent de nous. Devons nous absolument détruire l’autre Camerounais qui n’appartient pas à notre groupe ethnique tout simplement parce qu’il ne partage pas notre idéologie politique? Les ethnies sont certes instrumentalisées par le politique au Cameroun, nous le savons. Mais quelle réponse la société civile Camerounaise doit-elle donner à cette instrumentalisation ? Le vivre ensemble entre les ethnies ne peut il désormais devenir « le vivre ensemble en paix » ?

C’EST QUOI DONC LA NATION CAMEROUNAISE A LA FIN?

Le Cameroun est né des colonisations allemande, anglaise et française. C’est ce passé historique douloureux que partagent en commun toutes les ethnies qui forment aujourd’hui la nation Camerounaise. Celles-ci cohabitaient déjà pacifiquement avant l’arrivée des colons. Nos rois furent jadis des frères, et c’est cet idéal que nous devons nous battre pour conserver. Les ethnies, les tribus qui forment aujourd’hui la nation Camerounaise ne peuvent-elles pas cohabiter en réalité comme des richesses qui prouvent que la diversité culturelle, ethnique est bel et bien une réalité vivante dans notre pays? Si toute notre action politique était destinée à traduire en réalité l’idée d’une nation Camerounaise prospère, le temps n’est il pas venu de nous approprier cette appréciation du concept «nation» par Renan, lors d’une conférence donnée à la Sorbonne le 11 mars 1882 intitulée : Qu’est ce qu’une nation?

« L’homme n’est esclave ni de sa race, ni de sa langue, ni de sa religion, ni des cours des fleuves, ni de la direction des chaînes de montagnes. Une grande agrégation d’hommes, saine d’esprit et chaude de cœur, crée une conscience morale qui s’appelle nation. Tant que cette conscience morale prouve sa force par les sacrifices qu’exige l’abdication de l’individu au profit d’une communauté, elle est légitime, elle a le droit d’exister »

Il est temps pour nous de nous libérer de nos égoïsmes pour embrasser cette conscience morale qui s’appelle la nation Camerounaise!

Laziz Nchare, New York.

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