PAUL BIYA ENVOIE UN JOURNALISTE CORROMPRE LES COMBATTANTS SÉCESSIONNISTES
Par Michel Biem Tong, journaliste web en exil
« Depuis jeudi, un numéro de téléphone tente de m’appeler. Mais je refuse de répondre à l’appel. C’est un de mes combattants qui m’a convaincu de décrocher car ça peut être une urgence qui nécessite une intervention. Hier vendredi, quand j’ai décroché à l’appel, j’ai entendu un monsieur me parler un anglais soutenu je lui ai dit qu’il est mieux qu’il parle en pidgin (argot parlé dans le Cameroun anglophone et dans pas mal de pays anglophone d’Afrique de l’Ouest, ndlr) sinon je raccroche. Il a commencé à parler pidgin. Il s’est présenté comme un journaliste travaillant à Yaoundé et m’a dit qu’il voulait conclure un marché avec nous.
Je lui ai demandé qui lui a donné mon numéro et de se présenter. Il m’a dit qu’il s’appelle Georges Ewane. Je me suis mis à crier. Il m’a dit de me calmer. J’ai commencé à enregistrer la conversation. Il m’a proposé de l’argent et même de me faire voyager pour l’Europe à la fin des travaux si j’accepte d’enregistrer une vidéo dans laquelle je reconnais avoir signé les résolutions du Grand Dialogue National au nom des groupes armés. Je lui ai dit que je ne peux pas accepter cette proposition parce que nous contrôlons déjà notre territoire», a confié un général d’un groupe armé séparatiste à Jennifer Dikay, une activiste anglophone pro-indépendance.
Journaliste à la Brigade des Reportages Spéciaux (en charge de relayer les activités du président de la République) de la Cameroon radio and television (CRTV), porte-parole du Grand Dialogue National et élite du sud-ouest anglophone, Georges Ewane est donc, si l’on s’en tient à cet échange entre l’activiste et le général « ambazonien », accusé d’avoir voulu corrompre ce dernier afin de l’amener à faire enregistrer une vidéo dans laquelle il reconnait avoir représenté son groupe armé au cours dudit dialogue qui commence le 30 septembre prochain et d’avoir apposé sa signature au bas des résolutions. Notre tentative de joindre le confrère a été vaine.
Voilà à quoi est réduit le Dialogue National version Paul Biya. Sentant qu’une partie de la communauté internationale est très remontée contre cette formule de dialogue où c’est le président qui décide de tout y compris des sujets à débattre, conscient de ce que la mouvance séparatiste boude ce dialogue à la pensée unique qui ne tient pas compte de ses revendications, dans le but de donner à l’opinion internationale l’impression qu’il s’agit d’un dialogue véritablement inclusif, le pouvoir de Yaoundé use de ce qui lui est consubstantiel : l’achat des conscience. La corruption. Un autre jeune anglophone vivant à l’extérieur a témoigné sur les réseaux sociaux avoir été contacté pour jouer le rôle de combattant contre de fortes sommes d’argent. C’est dire si à l’approche de ce Dialogue National, le pouvoir de Yaoundé est dans la panique.