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PAUL BIYA, LE CANNIBALE QUI DÉVORE SES CRÉATEURS ET SES CRÉATURES

Les hamsters, c’est bien connu , sont des mamans attentives et prévenantes , qui chouchoutent et dorlotent leurs petits , qu’ils entourent des plus grandes attentions affectives . Et puis , oh , un jour et sans crier gare , ils dévorent eux- mêmes leurs propres progénitures , sans raisons apparentes .

C’est exactement de cette façon , que se comporte le tyran camerounais avec ses ministres et collaborateurs, avec une imprévisibilité absolue de passer du bon gentil au méchant , sans transition .

Quand on scrute , de près et à la loupe , les nominations et remaniements ministériels auxquels a procédé le despote camerounais , depuis son accession à la magistrature suprême en 1982 , on a la nette impression de se trouver en face d’un jeu de chaises musicales . Non seulement il joue , à peu de choses près , avec exactement les mêmes depuis 37 ans , mais il a aussi l’avantage de connaître certains d’entre eux , depuis l’époque où il fut tour à tour chargé de mission , directeur du cabinet civil et secrétaire général à la présidence de la République, mais aussi comme premier ministre de 1975 à 1982 .

Paul Biya , dont la seule stratégie ou pensée politique connue à ce jour , consiste à distribuer des prébendes ou des postes ministériels, à une caste qui lui doit , pour ensuite consolider son pouvoir personnel , tient ses collaborateurs dans le plus grand mépris . N’avait – il pas un jour confié à Laurent Fabius , alors ministre français des affaires étrangères : “ Tous ces petits messieurs , dont certains n’ont pas même le niveau d’un simple sous – préfet , me doivent absolument tout . De leurs carrières à leur situation personnelle “ ?

Grace à la disposition constitutionnelle, qui lui octroie une prérogative de nominations aux emplois civils et militaires , le tyran camerounais s’est constitué une solide clientélisme, en s’appuyant sur l’intimidation et le rôle nocif de l’Etat RDPC, parti unique au pouvoir . Il en a habilement joué , pour manipuler les élites et les ethnies .

À l’instar de son prédécesseur, mais aussi comme l’administration coloniale avant ce dernier , Paul Biya pour neutraliser ses opposants potentiels , ou réels , les prend au gouvernement ou leur confie la gestion d’entreprises para – publiques . Il accorde des prébendes , et ferme les yeux sur certaines pratiques malsaines de la gestion des deniers publics , afin de s’en servir au moment opportun comme arme de destruction juridique, contre ceux qui s’avisent à lui disputer son fauteuil .

Paul Biya , n’affectionne rien tant que le fait de se faire entourer , par des politiciens par décret , c’est-à-dire ceux qui ne détiennent que de légitimité, que celle qu’ils détiennent de lui , et de lui seul , et qui ne peuvent dès lors se prévaloir d’aucune émanation parlementaire, ou d’un ancrage électoral indépendant, leur procurant une légitimité populaire , et une existence politique propre et autonome .

Biya dont tout le monde ignore les realisations , et la nature réelle des activités , en dehors bien sûr de ses nombreux “ courts séjours privés à l’étranger “ , c’est-à-dire sa propension à n’aimer du pouvoir que son aspect jouissif et protocolaire , se méfie comme de la peste , des collaborateurs ambitieux qui fouinent un peu trop dans ses affaires .

Ainsi de Joseph Owona , vous savez le père de l’autre …

Ancien chancelier de l’université de Yaoundé ,  ensuite tour à tour , secrétaire général adjoint de la présidence, ministre de la fonction publique et de la Réforme administrative, ministre de l’Enseignement supérieur , avant de décrocher en 1992 , le gros lot en devenant le secrétaire général de la présidence de la République. Le titulaire de cette fonction , considéré comme le collaborateur direct et privilégié du chef de l’Etat , est de fait un président bis , et dispose officieusement d’un grand avantage sur le premier ministre , qui n’applique que les décisions venues du palais, et la plupart du temps initiées par le sous – roi , qu’est le SG.

Deux ans plus tard , inquiet de l’ascendance intellectuelle qu’il exerçait sur lui , Paul Biya va soudainement et sans prévenir , le destituer en le nommant au ministre de la santé . Le tyran qui soupçonnait son ancien collaborateur de nourrir de velléités de “ coup d’Etat “ à son endroit , va l’exclure de toutes instances gouvernements à partir de 2004, après lui avoir passer par le ministère de la jeunesse et des sports , qui pour quelqu’un de son acabit , serait dans un pays normal considéré comme un placard , et suscite un sursaut d’orgueil sanctionné à tout le moins par une démission. Au pays des Lions Indomptables, on est prêt à toutes les vexations , et humiliations y compris en buvant le calice de l’indignité jusqu’à la lie , pour prendre part au festin de la mangeoire nationale . Seule qui compte .

Avant Joseph Owona , le dictateur au prétexte fallacieux de “ faute grave “ , s’était débarrassé de William Aurélien Éteki Mboumoua , emblématique ministre des affaires étrangères , et secrétaire général de l’OUA à deux reprises ( ancêtre de l’UA) , qui lui faisait visiblement de l’ombre .

Paul Biya , un jaloux- né et menteur compulsif, avait raconté des salades au sujet de diplomate charismatique, en prétendant que ce dernier avait noué des relations diplomatiques avec la Hongrie , sans son aval . Or , verifications faites auprès des autorités hongroises , cette assertion s’est révélée être un grossier et vulgaire mensonge !

La vérité simple , est pourtant ailleurs . D’abord , retour en 1962 , date du retour de France de Paul Biya , flanquée d’une lettre en bonne et due forme de recommandation, de la part de Louis – Paul Aujoulat , un colon pieds noir , qui représenta naguère le Cameroun à l’Assemblée territoriale en France , dans le cadre de son parti le BDC ( Bloc démocratique camerounais) au sein duquel militait André – Marie Mbida , premier ministre du Cameroun de 1957 à 1958 .

Louis – Paul Aujoulat , est à la fois le tuteur du président Ahidjo et de Paul Biya . S’il mît le pied à l’étrier à Ahidjo en politique, c’est également à lui que le jeune Paul Biya doit son inscription au Lycée Général- Le Clerc de Yaoundé , en 1952 , mais aussi sa bourse pour la métropole , comme on disait au temps des colonies .

Alors , quand rentre au Cameroun le jeune Paul Biya âgé de 29 ans , le Cameroun vient d’accéder à l’indépendance que l’UPC juge “ nominale “ , deux ans plutôt .

Le président Ahidjo , recommande à William Aurélien Éteki Mboumoua , de le prendre comme directeur à son cabinet . Mais la cohabitation entre les deux hommes , ne fera pas long feu , et ne sera pas de tout repose . Selon Samuel Eboua, Éteki se plaint constamment auprès du président Ahidjo, de son poulain Biya , qui ne suit pas ses dossiers , et s’implique très peu dans le travail d’équipe du ministère.

De guerre lasse , Ahidjo reprendra Biya sous son aile . C’est donc ce vieux “ contentieux “ que Biya réglera en janvier 1987 , quand il apprend que la France semble avoir pour son ministre des visées présidentielles .

En 1992 , Biya va aussi se séparer d’un brillant ministre . Oumarou Sanda . Ce dernier est apprécié , par ses compatriotes et les partenaires du Cameroun, pour ses résultats au ministère des postes et télécommunications . Il payera le prix de sa compétence .

Le cimetière des éléphants politiques camerounais , est ainsi plein à craquer d’hommes d’Etat , que Biya a mis la touche et définitivement sacrifiés .

Jean-Pierre Dupont

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