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PAUL KAGAME VA ENTRER AU PANTHÉON DE L’HISTOIRE, PAUL BIYA CONDUIT LE CAMEROUN AU MOUROIR

De part le monde, certains hommes d’Etat naissent, pourvus d’une onction. Celle-ci les emmène à traverser leur époque en accomplissant des actions d’éclat. Ces actions peuvent être des actes glorieux ou l’inverse. Quand ils sont lumineux, ils transforment une nation, ils rendent les hommes heureux et par voie de conséquence, ces actes ennoblissent leurs auteurs et les font entrer au Panthéon de l’Histoire.

Pour la France, Napoleon 1er avait rêvé de conquérir toute l’Europe afin de faire de son pays le plus grand empire du monde. Ce fut un rêve démoniaque, mais il osât rêver ainsi. Charles de Gaulle, après la Deuxième Guerre mondiale qui humilia son pays, après les débâcles de Bien-Dien- Phû et celle d’Algérie, la France sombra. De Gaulle s’engagea à lui restituer sa « grandeur » dans le monde. Il n’échoua pas de cette œuvre .
Ses successeurs, Georges Pompidou et François Mitterrand furent considérés par leurs compatriotes, comme le « président de la grande industrie » pour le premier, et comme celui des « grands travaux » pour le second.

En Afrique, même si les modèles ne sont pas encore légion, on peut tout au moins noter que, il y a 20 ans, Paul Kagame, le président d’un des plus petits État du continent avait promis qu’avant de quitter le pouvoir au Rwanda, il aura fait de son pays « le Singapour d’Afrique ». Il avait rêvé, il avait pris un engagement.
Le Rwanda c’était alors quoi ? Un petit pays de 26.333 km2, enclavé en Afrique centrale. Il a un paysage montagneux, verdoyant; un sol aride où ne pousse par endroit que le café, la banane ou le pyrèthre, c’est tout ! Ses gorilles sur les flancs du mont Muhabura ou du volcan Karisimbi, de nombreux touristes vont contempler leurs danses trapézoïdales. Ces touristes sont une source importante de devises pour l’économie du pays.

Prendre l’engagement devant son peuple de transformer ce pays quasiment artificiel en centre financier mondial comme l’est Singapour en Asie du Sud-Est ne peut relever que d’un rêve fou que peu de personnes n’oseraient y croire. Paul Kagame n’est pas en train de rater son pari, c’est le moins que l’on puisse dire. Si vous avez été au Rwanda il y a 10 ans seulement, que vous y retournez aujourd’hui, les transformations matérielles, infrastructurelles et mentales vous donneraient le tournis. Les Rwandais sont désormais respectés dans le monde !

Et le Cameroun alors ? Il n’est pas encore un enfer, mais il n’est plus le paradis qu’il fut non plus. Et pourquoi alors ? Parce que son président ne rêve pas pour la République, il rêve pour lui. En voici un exemple: Paul Biya rend visite à son homologue français de l’époque, François Hollande. Répondant à une question de journaliste sur le perron du palais de l’Elysée le 2 juillet 2015, il dit: « Ne dure pas au pouvoir qui veut, mais qui peut ».
Ainsi donc, en accédant au pouvoir en 1982, Paul Biya avait pris une option: rester au pouvoir, jouir des honneurs du pouvoir et de ses avantages, le plus longtemps possible. C’est un engagement personnel, et pour lui seul, que le locataire du palais de l’Unité est en passe de réussir.

Chaque engagement que l’on prend, quelqu’en soit le domaine et la nature, on se donne les moyens de l’atteindre et de concrétiser son vœu. Ainsi, pour rester très longtemps à la tête d’un pays, il y a des comportements qu’il faut adopter et les faire appliquer : on peut choisir de contenter son peuple en le rendant heureux, en transformant son pays en paradis. On peut choisir de faire l’inverse.

Dans cette deuxième option, alors on fait ce que Paul Biya fait:
réduire l’influence des médias, confectionner les institutions à ses mesures, mettre l’armée et la justice aux ordres, faire baisser le niveau de l’éducation, supprimer l’instruction civique, réduire le pouvoir d’achat de certaines catégories de fonctionnaires, faire prospérer la corruption et la dépravation des mœurs, entretenir des antagonismes, diviser les ethnies et l’opposition politique. Quand on a mis ce vaste chantier en place, – et cela pourrait prendre plusieurs décennies-, on pourrait alors durer au pouvoir jusqu’à ce que mort naturelle advienne.

Il est impossible de travailler à construire un pays viable et respecté, réfléchir en même temps à mettre en place des mécanismes devant faire durer quelqu’un au pouvoir. Paul Biya a fait le second choix.

Nous aurions aimé que, le 6 novembre de chaque année, date commémorative de son arrivée à la tête de l’Etat, les Camerounais soient conviés à inaugurer un grand complexe industriel, une infrastructure routière, ou une belle invention économico-scientifique qui magnifierait la grandeur du pays.

Les Camerounais sont malheureusement réduits à célébrer une date comme si la longévité au pouvoir était un programme ambitieux dont on devrait s’en réjouir, pendant que dans d’autres pays, les populations sont fières des programmes osés de leurs dirigeants, et des grandioses réalisations effectuées, le 6 Novembre pour nous demeure une fête, celle de la longévité au trône.

Xavier Messe À Tiati, Journaliste chevronné

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