Accusé levez-vous Afrique Langue serpentine

TOUS LES AVIONS DU CAMEROUN SONT MORTS

Quatre des six avions dont dispose la Compagnie nationale de transport aérien du Cameroun (CAMAIR-CO) ont été  cloués au sol, faute de maintenance, en début mars.

« Nous sommes obligés de procéder à l’annulation de plusieurs vols ou de reporter d’autres », regrette une source proche du département de l’exploitation qui décrit une situation difficile pour l’entreprise qui a du mal à assurer la desserte nationale avec plus de 100 vols hebdomadaires.

Cette situation a suscité la colère des voyageurs,  obligés de passer de longues heures d’attente avant d’embarquer , à défaut d’être programmé carrément pour le lendemain avec ce que cela entraîne comme préjudice.

En dehors du Boeing 767-300 ER en révision à la base d’Ethiopian Airways à Addis-Abeba (Ethiopie), les deux Boeing 737-700 sont en panne et selon notre interlocuteur, les services techniques avaient déjà alerté sur la situation des moteurs des deux aéronefs qui allaient atteindre leurs butées d’utilisation vers juin 2018.

Par la suite, l’un des avions MA60-600 a aussi été  cloué au sol deux jours plus tard , ce qui faisait  que  CAMAIR-CO ne disposait plus  qu’un MA60-600 et un Bombardier pour couvrir le plan de vol.

Le dernier avion qui  restait à la compagnie camerounaise est également  cloué au sol, après les 6 autres vieux coucous  parmi lesquels les deux 737 qui effectuaient les lignes internationales ( Abidjan, Dakar, Libreville, Bangui) et rapportaient 80% des recettes. Les MA 60, les avions les plus chers du monde, mais dont les pièces de rechange n’existent pas, doivent être jetés dans la poubelle ou dans la casse . Les moteurs sont arrivés en fin au même moment. Il s’agissait de vieux avions qui devaient être changés au bout de 6 mois.

Sur la base du rapport d’activités publié en février dernier, la direction générale de CAMAIR-CO indiquait pourtant que le chiffre d’affaires de l’entreprise a connu une forte augmentation, passant de 5 milliards de FCFA de 2016 à 16,4 milliards de FCFA en 2017, puis à 26,6 milliards de FCFA en 2018. Où sont donc passés tous ces milliards ?

Créée en 1971 par l’ancien président Ahmadou Ahidjo, Cameroon Airlines était une fierté pour le Cameroun et même toute l’Afrique subsaharienne. La compagnie avait acquis le plus gros porteur du monde devant Air France et desservait l’Éthiopie, le Kenya qui, aujourd’hui, disposent d’une immense flotte aérienne.

Juste 6 ans après l’arrivée de Paul Biya au pouvoir, la compagnie était déjà tombée en faillite à cause de la gabegie. En 1988, le FMI préconise la privatisation, alors que son endettement  s’élève déjà à  11 milliards de F CFA. Mais  le gouvernement se lance dans une restructuration bizarre. La compagnie perd son Boeing 737 en 1995, dans un crash à l’aéroport de Douala. L’argent qui a été reversé par une compagnie d’assurance  sud-africaine pour les victimes et l’achat d’un nouvel appareil, est détourné par les membres du gouvernement dont le chef de gang est Issa Tchiroma. Puis l’unique 747, lors d’une sortie de piste, en 2000, à Roissy-Charles-de-Gaulle, meurt. En 2005, les dettes de la compagnie  franchissent le cap des 100 milliards.

Paul Biya adécide de créer Camair-Co. Pas moins de 11 directeurs généraux et un administrateur provisoire se sont succédé à la tête de la Camair dans l’espoir d’un renflouement jamais réalisé. Ayant résolument choisi l’option de l’acharnement thérapeutique, l’État est allé jusqu’à verser une subvention mensuelle de 20 milliards de F CFA dans les caisses de l’entreprise pour payer les salaires.

Le 26 janvier 2006 toutefois, le gouvernement  se rend à l’évidence et finit par lancer un appel d’offres en vue de céder 51 % du capital de la compagnie. Six mois plus tard, un consortium constitué de Brussels Airlines et de la société de capital-risque camerounaise Cenainvest est désigné adjudicataire provisoire. Le transporteur belge entend reproduire le modèle de la privatisation réussie de Kenya Airways au profit du transporteur néerlandais KLM. L’appel d’offres est annulé par le ministre des Finances de l’époque, Polycarpe Abah Abah. En 2008, près de 1800 employés sont mis au chômage. Le régime continue à faire croire que la compagnie va se régénérer. Maintenant, tout est terminé. Paul Biya a encore échoué en plein vol.

J. RÉMY NGONO

Articles Similaires

Quitter la version mobile